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la poudre à canon, qui cause un ébranlement violent lorsqu’elle est proche, et se fait à peine sentir à une grande distance. C’est par cette même raison qu’on se console avec le temps d’un malheur, quelque violent qu’il ait été.

Cette disposition dans l’ame humaine est peut-être ce qui rend les récompenses que promettent, et les châtimens dont menacent les religions, si peu efficaces. Examinez bien quels motifs ont balancé l’amour dans le cœur de cette femme, à qui son amant a demandé un rendez-vous : la crainte du scandale qui en résultera parmi ses connaissances et ses parens ; la crainte qu’une grossesse de contrebande, la naissance d’un enfant illégitime, ne la plongent dans un abîme de chagrins ; voilà ce qui la retient, plutôt que les chaudières bouillantes de l’enfer, qui certes devraient inspirer bien plus d’effroi. Si dans de certaines occasions, ce sentiment d’effroi a été exalté par des circonstances particulières, telles qu’un beau sermon, une solemnité imposante, l’impression n’en a jamais été durable, elle s’est effacée par degrés, et le monde a repris son train.

Il en a été de même des récompenses. J’ai de la peine à croire que le bonheur de voir Dieu face à face ait jamais enfanté une belle action.

Mais non-seulement il me paraît prouvé que les opinions religieuses n’empêchent pas le mal ; elles ont de plus, sur les habitudes de