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aussi Ton se défend ; on aime à suivre de près les discussions budgétaires ; on interpelle ceux qui les votent et souvent on les change. C’est du moins le beau privilège des pays libres.

Rara temporum felititasubi sentire quus veiis et quse sentias dieere lieet.

E. FOURNIER DE FLAIX.

INDIVIDUALISME. — « Individualisme » est un néologisme de la langue scientifique devenu indispensable pour exprimer un état d’esprit qui se dégage comme une protestation spontanée contre la tendance contemporaine du législateur à énerver la personnalité humaine sous la tutelle gouvernementale. Ce mot qui n’a rien de commun avec l’égoïsme, objetd’ une réprobation unanime, est l’opposé de « collectivisme », cette dernière et redoutable forme du socialisme militant (V. Socialisme). Loin de couvrir un aveugle système de réaction politico-économique, il indique au contraire une propension à exciter, sous l’aiguillon de la nécessité, le sentiment de la responsabilité et, par voie de conséquence, la productivité de l’effort. Il représente donc, de fait comme d’intention, une idée éminemment progressive et moralisatrice, s’accommodant aussi bien des exigences de la raison positive que des aspirations de la dignité chrétienne. Ajoutons à son honneur que ses plus marquants adeptes sont les créateurs de cet « altruisme « qui est au général ce que la charité est au particulier. N’oublions pas non plus de faire remarquer que la théorie moderne de l’association des intérêts (V. Association ) a plus à attendre d’un concours réfléchi et libre que des rigueurs des institutions purement humaines.

La sociologie contemporaine reconnaît trois phases successives de développement depuis un siècle : — la révolution civile, sortie du mouvement philosophique de 1750, qui, après avoir remué le monde civilisé, a définitivement jeté d’indestructibles racines chez les peuples latins des deux hémisphères ; — la rénovation scientifique à son apogée qui, non contente de ses découvertes, poursuit l’appropriation des forces immanentes à nos besoins ; — l’évolution économique à ses débuts qui, sans souci des formes politiques, a songé déjà à sortir du domaine spéculatif et à substituer au culte affaibli des traditions la préoccupation méthodique d’une amélioration morale et matérielle de la condition de l’homme.

Dans ce dernier ordre d 1 idées, le progrès, objet légitime des aspirations communes, a deux voies ouvertes devant lui : l’une étroite et très régulière,sur laquelle l’homme, cou-INDIVIDUALISME

sidéré en tant que cellule première de l’organisme social, s’avancerait automatiquement et d’un pas lent et uniforme, sous la conduite dune puissance humaine jugée supérieure, vers la terre promise du bien-être parfait ; — l’autre, ardue et large, mais cependant attrayante pour le labeur courageux, parce que l’effort persistant, respectueux des impérissables lois de la nature y reçoit finalement une récompense proportionnée à la clairvoyance de son génie.

La première est celle qu’entendent imposer à Thomme l’impérialisme monarchique prussien, l’autocratie russe, le néo-christianisme luthérien allemand ou catholique franco-autrichien, le socialisme d’État allemand et le collectivisme possibiliste francobelge (V. Socialisme).

La seconde est celle où est entrée résolument une race qui, grâce à une inébranlable fidélité au principe du self-help, est parvenue à étendre sa suprématie industrielle sur le globe et, ce qui est peut-être plus durable encore, à établir sans conteste l’empire exclusif de ses mœurs sur deux continents nouveaux.

Entre les deux, il semble qu’il y ait de nos jours hésitation jusque dans la chaire économique et que l’école orthodoxe soit menacée de désertions irréfléchies. La ren^ contre fatale de l’Étatisme allemand et de l’individualisme anglo-saxon est imminente ; de nombreux indices — l’attitude même des champions à la récente conférence de Berlin (mars 1890) — paraissent indiquer que c’est la France qui aura le périlleux honneur de servir de champ d’expérience aux deux partis en présence.

Nous n’avons pas à exposer les arguments de doctrine, ni même à discuter les faits en tenant compte des prédispositions ethniques. Nous nous contentons de renvoyer -aux articles État, Socialisme, Association, Patronat, Mutualité, Épargne, Prévoyance, etc. La notice bibliographique ci-dessous n’a. pour but que de faciliter les recherches des travailleurs sérieux et des hommes d’affaires* Georges Bouctot.

Bibliographie.

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I. — ECOLK ÉrATISTE.

A.— Allemands.

a. Livres et traités : V. les œuvres de Hegel, Fichtb (voy. ces noms) et de l’école des nouveaux hégéliens. — L£ty Bhdsi., Sur la philosophie allemande [Revue des Deux Mondes, 1 SS8-90) ; — Œuvres de Rodbertus, K. Lassalie, Karl Marx,. Engel. — Marlo, Untersuchungen ueber die Organisation der Arbeit (Recherches sur l’organisation du travail), 2« édit. 1885. — Adolphe Wagnëb, Die gesellschaftliche Frage (la Question sociale), 1872 ; — Untersuchungen ueber die natur lichen Gesetze, etc. (Recherches sur les lois naturelles q«*