Page:Say - Chailley - Nouveau dictionnaire d’économie politique, tome 2.djvu/473

Cette page n’a pas encore été corrigée

PEEL

— 469 —

PEEL

d’enquête chargé d’examiner la question de la reprise des payements en espèces. Dans le même comité siégeaient aussi Ganning, Tierney, sir James Mackintosh etHuskisson. l’influence de ces esprits éclairés modifia complètement son opinion sur cette question et il en convint avec une franchise des plus honorables : « Je ne rougis pas d’avouer, dit-il dans le cours de la discussion, que je suis entré dans la commission avec des idées bien différentes de celles que j’ai aujourd’hui ; mais j’y suis entré avec la ferme résolution d’oublier toutes mes impressions passées et le vote que j’avais donné quelques années auparavant. » Le 7 avril, il présentait le bill qui ordonnait la reprise des payements en espèces et il contribuait puissamment aie faire adopter.

Devenu ministre de l’intérieur par suite de la retraite de lord Sidmouth (novembre 1821), Robert Peel signala son passage aux affaires par la réforme de la législation criminelle, réforme préparée par les écrits de sir Samuel Romilly et de sir J âmes Mackintosh, mais qu’il eut le mérite de réaliser aussitôt qu’elle se trouva mûre dans les esprits. En 1826, il la commençait en faisant passer deux bills, l’un qui appelait à être membre du jury tout propriétaire ayant 10 livres sterling de revenu en terres et possédant à bail, pour vingt et un ans, des terres rapportant 2 livres sterling ; l’autre qui réduisait le nombre des accusations criminelle et limitait la juridiction des juges de paix. Le 9 mars 1827, il présentait un bill pour la revision des statuts concernant le vol. Il proposait d’adoucir, dans certains cas, la pénalité et d’exonérer les plaignants des frais de poursuites. Cette réforme fut adoptée par la Chambre des communes le 17 avril et par la Chambre des lords le 18 mai. Dans la session suivante, il fit passer encore quatre bills modifiant les lois relatives aux atteintes à la propriété et aux crimes contre la paix publique. La mort de lord Liverpool, survenue au commencement de l’année 1827, ayant amené la dis- . solution du ministère et l’avènement de M. Canning, Robert Peel donna sa démission (11 avril), en la motivant sur son opposition àla mesure de l’émancipation des catholiques. Moins d’un an après, M. Canning mourait ; le duc de "Wellington était appelé à former un nouveau ministère et Robert Peel se trouvait réintégré dans son poste de secrétaire d’État de l’intérieur. Le 8 mai 1828, il combattait encore une proposition de sir Francis Burdett, relative à l’émancipation des catholiques ; mais l’année suivante , la fameuse élection d’O'Connell dans le comté de Clare lui fit comprendre que le moment était venu de céder au vœu de l’opinion. L’émancipation fut annoncée dans le discours d’ouverture du Parlement. Aussitôt les vieux protestants de l’université d’Oxford jetèrent à ta face de leur représ entant ce reproche de trahison que les protectionnistes devaient lui prodiguer plus tard. Robert Peel, sans se laisser ébranler par ces inintelligentes clameurs, donna sa démission de représentant de l’Université. Non réélu (sir Robert Inglis, le candidat des vieux anglicans, l’emporta sur lui), il fut obligé de se faire élire par Wesbury, un des bourgs pourris dont disposait la couronne. Le 5 mars 1 821 , il faisait la motion de l’émancipation ’des catholiques.

Le ministère du duc de Wellington fut forcé de se retirer après la révolution de Juillet (17 novembre 18301 et, deux ans après, les whigs réussirent à faire passer le bill de réforme. Les premières élections qui eurent lieu après l’adoption du bill (29 janvier 1833) furent tellement favorables aux whigs, qu’on crut un moment que le parti tory ne s’en relèverait jamais. Mais on avait compté sans Robert Peel : à force de persévérance, d’habileté et d’éloquence, il réussit à réorganiser et à relever son parti. Le 9 décembre 1834, le roi, lassé des whigs, eut la velléité de le rappeler au ministère. Mais c’était trop tôt. Constamment en minorité à la Chambre des communes, le ministère Peel ne vécut que quatre mois.

Ce fut seulement en 1841 que Robert Peel recueillit le prix de ses laborieux efforts. Mais alors il arriva au pouvoir, porté par une majorité aussi considérable que celle que les whigs avaient eue après le bill de réforme et dont ils n’avaient pas su profiter. Cependant la situation était des plus critiques, et un homme d’État moins habile et moins sûr de lui-même aurait hésité à en prendre la responsabilité : une crise affreuse pesait, depuis 1838, sur l’industrie et sur le commerce de la Grande-Bretagne. Le déficit du Trésor, qui s’était élevé à 36 millions de francs en 1839, à 44 millions 1840, à 35 milions en 1841, allait atteindre 102 millions en 1842. Robert Peel comprit alors, et c’est son immortel titre de gloire, que le moment était venu de porter hardiment la hache dans la vieille et informe législation économique delà Grande-Bretagne. Reconnaissant que le régime prohibitif, âme de cette législation, entravait le développement de la prospérité publique et des revenus du Trésor, il commença son admirable série de réformes commerciales. Après avoir rétabli Vincome-tax pour assurer l’équilibre des dépenses et des recettes, il modifia ou supprima, pour son coup d’essai, quarante-quatre articles du tarif. La prohi-