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cipes d’Économie politique, t. II, p. 346), si je sympathise avec les socialistes pour toute la portion pratique de leurs aspirations, je suis complètement opposé à la portion la plus remarquable et la plus violente de leur enseignement, à leurs déclamations contre la concurrence. . . Une de leurs plus grandes erreurs, à mon avis, est celle qui leur fait attribuer à la concurrence tous les maux de la société actuelle. Ils oublient que partout où il n’y a pas de concurrence, il y a monopole, et que le monopole, quelle que soit sa forme, est une taxe levée sur ceux qui travaillent au profit de la fainéantise, sinon de la rapacité. »

Ferkand Faure.

Bibliographie.

Voir entre autres auteurs : Rossi, Cours d’économie politique, t. I,p. 102 et s. — Stuart Mill, Principes d’économie politique (trad. Dussard et Courcelle-Seneuiî), 1. 1, p. 450 et t. II, p. 503. — Michel Chevalier, Cours d’économie politique, 2* année, p. 474 et s.— Courcelle-Seneuiî, Traité d’économie politique, t. I, p. 416 et s., t. II, p. 69. 76, 81 et s. — Jos. Garnier, Traité d’économie politique, 6* édit., p. 107 et s. Goumot, Revue sommaire des doctrines économiques, p. 17i et s. — Jourdan, Cours analytique d’économie politiques, p. 454 et s. — Beauregard, Eléments d’économie politique, p. 197 et s. — Deux économistes de la fin du dernier siècle ont eu le rare mérite de ne parler des monopoles qu’après en avoir donné une assez bonne définition ; ce sont Condillae, le Commerce et le Gouvernement, F* partie, ch. xxi, et Condorcet, dans son article Monopole et monopoleur. Ce mérite est partagé par un écrivain qui n’acceptait pas le titre d’économiste, par Proudhon, V. les chapitres Concurrence et Monopole dans le tome I des Contradictions économiques. — M. Ch. Gide, dans ses Principes d’économie politique, 1" édit, p. 459 et s. semblait avoir cherché, lai aussi, à asseoir la théorie du monopole sur une définition. Maïs il a cru devoir, dans la 3« édition de son livre, supprimer le passage qui contenait cette définition. MONTCHRÉTIEN (Antoine le), sieur de Vateville, né vers 1575 à Falaise, en Normandie, appartient à l’économie politique par son ouvrage intitulé : Traité de l’économie politique. C’est la première fois que ce nom apparaît en tête d’un livre. Celui de Montchrétien parut en 1615 et fut dédié par l’auteur au roi Louis Xïlï et à la reine mère. Nous, verrons si le titre est justifié, après avoir jeté un coup d’œil sur la biographie de Montchrétien, sans nous arrêter pourtant à ses tragédies et aux œuvres poétiques qui lui assignent une certaine place dans l’histoire de la littérature française. Ce n’est que dans la dernière partie de sa vie qu’il traita des matières économiques, quittant le domaine de la fiction pour s’occuper des réalités qui forment le fonds de la vie des peuples.

De modeste extraction (on dit qu’il était le fils d’un apothicaire de Falaise), il fut confié à la tutelle d’un voisin, qui le mit en domesticité auprès de deux jeunes seigneurs, MM, de Tournebu et des Essarts, alors élèves du collège de Caen. L’enfant heureusement doué reçut avec eux l’éducation d’un jeune gentilhomme rompu à tous les exercices du corps comme de l’esprit. Il fit de brillantes études et composait à dix-neuf ans sa tragédie de Sophonisbe, suivie de plusieurs autres, et en outre des bergeries, des sonnets, des stances, etc. Sa précoce renommée, ses manières engageantes, sa figure intelligente et fine, dont son portrait, placé entête de l’édition de ses tragédies, donne l’idée, enfin son humeur entreprenante, le mirent en relation avec les principales familles parlementaires de Caen et de Rouen. Il vécut notamment dans l’intimité du président Claude Goulard et, sans qu’on puisse le suivre à chacun dés degrés qui expliqueraient cette élévation, il fut anobli, changea son premier nom de Mauchrétien en celui d’Antoine de Montchrétien, et devint bientôt après seigneur de Vateville. On croît que ce nom lui vint d’une terre noble que lui apporta en mariage une jeune et riche veuve dont il avait défendu le patrimoine.

La vie de Montchrétien est un tissu d’aventures, et ceux qui s’attendraient a y trouver le caractère méditatif et recueilli d’un observateur impartial, d’un penseur qui se place en dehors des passions et des intérêts du jour, éprouveraient une grande surprise devant cette destinée semée d’incidents au moins aussi dramatiques que celle de ses pièces de théâtre. Il faillit être tué dans un duel et, laissé pour mort, il reçut une réparation de douze mille livres. Dans un second duel, il tua son adversaire, et, pour échapper à la rigueur des nouveaux édits, il se réfugia en Angleterre. Présenté à la cour, il sut intéresser le roi Jacques I er , qui obtint sa grâce de Henri IV. Ce séjour de quelques années en Angleterre fit sur lui une forte impression. Il le força à fixer son attention sur l’industrie et le commerce et à en comprendre toute l’importance pour les États. Il reçut des impressions analogues en visitant la Hollande. A peine rentré en France, il se tourna vers l’industrie, le poète se fit fabricant. Il installa ses ateliers d’abord dans la forêtd’Orléans, ensuite à Châtillon-sur-Loire. Il mit en œuvre le fer et l’acier, il fabriqua des lancettes, des couteaux et des canifs, des ustensiles de quincaillerie. Il s’y enrichit, dit-on, et le bruit se répandit qu’il faisait de la fausse monnaie. On en avait dit autant de Bernard Palissy. L’accusation eut peu de succès, au moins auprès des gens éclairés, et ne lui nuisit point auprès du prince de Condé, le père du grand Condé, qui se montra son protecteur et à qui il dédia ses poésies.