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boîtes, les cotons et cotonnades, la bonneterie et la soierie ; le troisième, les cuirs, peaux, poils de chapellerie, les fers, la quincaillerie, les boisa brûler et le charbon debois. Les tableaux devaient être imprimés et envoyés à chaque district au plus tard le d er germina].

La Convention ne fixait, en effet, dans son tableau que le maximum du prix de production ou de fabrication ; l’agent national de choque district devait faire d’après ces éléments un tableau contenant les noms des objets et marchandises que les habitants du district étaient dans l’usage de consommer ; l’indication de leur lieu de production ou de fabrication, la distance du chef-lieu de district, l’évaluation des frais de transport par terre et par eau, d’après un tarif fixé par les articles 5 et 6 du décret. Au prix de production ou de fabrication augmenté des frais de transport, l’agent de district devait ajouter 5 p. 100 de bénéfice pour former le maximum du marchand en gros ; puis 10 p. 100 de bénéfice pour former le prix de vente du détaillant.

L’administration du district devait déterminer le nombre d’exemplaires de ce travail qu’il serait nécessaire de publier pour que l’objet en fût connu aux municipalités. La commission des subsistances et des approvisionnements était autorisée à prendre toutes les mesures pour l’exécution du décret, dont elle demeurait responsable et dont elle devait rendre compte au Comité de salut public.

C’était un travail gigantesque, etl’administration terroriste se lançait dans un dédale inextricable. Barrère put avec raison s’écrier plus tard, non sans naïveté : « Quel despote eût osé s’engager dans un tel labyrinthe ? Qnels esclaves auraient osé lui dévoiler les secrets de leurs richesses ? » 11 fallait en effet tout le despotisme de la Convention pour tenter pareille chose.

Le comité des subsistances attendait du maximum, ainsi établi, les meilleurs résultats.

Au début, chaque district avait établi un maximum particulier et, pour la même matière ou marchandise, il existait plus de 600 maxima : le comité des subsistances pensait que ces tableaux du maximum uniforme pour toute la République allaient rétablir la circulation. Il estimait, d’autre part, que « c’était un cours d’éducation publique pour les producteurs et les consommateurs, un réverbère placé au-dessus du commerce pour en éclairer toutes les ruses et tous les profits. Ces tableaux, ajoutait-il, présenteront à tous les citoyens une carte géographique des

MAXIMUM

secours adaptés aux besoins, des matières produites et des matières fabriquées, des talents de l’industrie et de l’activité du commerce. C’est une topographie qui est à la fois agricole, manufacturière, industrieuse et économique. »

. Exécution des lois du maximum ; leurs effets. Les lois du maximum ont-elles été exécutées ?

Il résulte de nombreuses notes insérées 

au Moniteur universel qu’elles ont été presque partout violées. Les conventionnels l’ont déclaré maintes fois à la tribune. « Le maximum n’est pas suivi, » dit Cambon (séance du 16 brumaire an IIÏ). « Le maximum n’a jamais reçu son exécution, avoue Sallier, dans la séance du 3 nivôse an III, ou plutôt cette exécution s’est concentrée dans le petit nombre de citoyens, toujours fidèles à la loi et toujours victimes de l’intrigue et de l’agiotage ». « Il s’agit moins de savoir si on conservera le maximum que de savoir si on le recréera, car il n’existe nulle part », disait ■ Cochon à la même époque.

Les annales des tribunaux révolutionnaires prouvent aussi que partout l’intérêt privé cherchait à éviter le maximum. Les condamnations à des amendes énormes, à la prison, au pilori, prononcées pour les moindres infractions à la loi, les peines de toutes sortes, comme celles qu’édicté l’arrêté de Saint-Just et Lebas du 3 nivôse an II dans le département du Bas-Rhin, aux termes duquel la maison de quiconque serait convaincu d’avoir vendu au dessus du prix réglementaire devait être rasée, témoignent des efforts faits par la Convention pour triompher de la loi de l’offre et de la demande, et de leur inutilité.

Les effets du maximum n’en ont pas été moins désastreux.

« Il n’y a rien de si difficile que de forcer un homme à se ruiner, avait dit Ducos à la Convention le 28 avril 1793, au moment de la discussion du premier décret sur le maximum. S’il y a quelque expédient secret pour l’éviter ! soyez sûr qu’il le découvrira. L’intérêt privé fut toujours plus habile que les lois prohibitives ne furent rigoureuses. L’ordre déporter les grains aux halles ne sera qu’un avis de les cacher plus soigneusement. Recourez aux confiscations, aux visites domiciliaires ; recommencez le code des gabelles, vous serez plus odieux et mieux trompés : voilà tout. » La prédiction si fondée de Ducos se réalisa à la lettre.

« Après la proclamation du maximum, dit M. Taine J , en citant nombre d’exemples à l’ap- [1]

  1. Les Origines de la France contemporaine, t. III, p. 488 6t suiv.