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moires politiques et économiques sur les produits, commerces, fabriques et mines de l’Espagne).

Cette oeuvre, un peu négligée des contemporains, est néanmoins la meilleure histoire que Ton puisse trouver sur l’économie politique de l’Espagne, depuis Philippe IV jusqu’à Charles III.

Eugenio de Larruga s’appliqua principalement à combattre le régime réglementaire, alors en vigueur en Espagne, et auquel il attribue la décadence de l’industrie. Il ne combat pas avec moins d’énergie la funeste habitude prise enEspagne, depuis Philippe IV, d’amener des fabricants ou des ouvriers étrangers. Loin de s’étonner de la chute de l’industrie nationale, il n’hésite pas à la rattacher à ces deux causes : l’une, les entraves et les gabelles du système réglementaire ; l’autre, la présence d’étrangers qui disparaissaient forcément après fortune faite, sans avoir même transmis leur savoir-faire dans aucune des branches des arts ou des métiers. A. A.

LASSALLE (Ferdinand), célèbre agitateur socialiste, naquit à Breslau, le il avril 1825, de parents israélites. Lorsqu’il eut terminé ses études secondaires au gymnase de sa ville natale, son père, qui était négociant en gros, le fit entrer à l’école commerciale de Leipzig ; mais le jeune Lassalle n’éprouvait aucun goût pour ce genre d’études et il ne tarda pas à renoncer au commerce pour s’adonner au droit, à la philosophie et à la philologie. Il se distingua aux universités de Breslau et de Berlin et commença, à peine âgé de dix-neuf ans, un ouvrage « sur la philosophie d’Heraclite le Ténébreux », qu’il termina plus tard et publia en 1857. Disciple de Fichte et surtout de Hegel, il adopta, en politique, les idées radicales. Après avoir visité Paris où il vit Henri Heine, il se rendit à Berlin avec l’intention d’y professer. Là il fit, en 1845, la connaissance de la comtesse Sophie de Hatzf eld et commença dès lors une vie d’aventures romanesques et politiques qui lui valut, à diverses reprises, des démêlés avec la justice. La comtesse de Hatzf eld, séparée de son mari, voulait obtenir une pension en rapport avec son rang et sa fortune et se heurtait à maintes difficultés ; Lassalle résolut de lui prêter appui et entama une lutte qui aboutit, après neuf années, au triomphe des prétentions de la comtesse devant les tribunaux. Au cours de cette lutte, deux amis de Lassalle, Mendelssohn et Oppenheim, avaient tenté de s’emparer d’une cassette appartenant à la baronne de Meyendorff, dans l’espoir d’y trouver des papiers intéressants pour le procès de la comtesse de Hatzfeld. Ils furent poursuivis à raison de ce fait, et Lassalle se trouva impliqué dans l’accusation ; Mendelssohn fut condamné, Oppenheim et Lassalle obtinrent un acquittement (11 août 1848). Mis en liberté, Lassalle se jeta dans le courant révolutionnaire, prit part à la rédaction de la Nouvelle Gazette Rhénane, que dirigeait Karl Marx et fut bientôt à la tête de l’agitation dans le gouvernement de Dûsseldorf ; arrêté le 22 novembre 1848, sous l’inculpation d’excitation à la révolte contre le pouvoir royal, il fut acquitté par le jury le 3 mai 1849, poursuivi de nouveau, à raison des mêmes faits, sous l’inculpation moins grave de résistance à la police, et condamné à six mois de prison. En 1857, il quitta Diisseldorf pour se rendre à Berlin ; il y publia, en 1859, Franz de Sickingen, tragédie plus politique que littéraire, où il développait l’idée que les grands changements historiques ne s’accomplissent que par le fer et le feu. Partisan fanatique de l’unité de l’Allemagne, dans sa brochure sur la Guerre d’Italie et la mission de la Prusse (1859), il préconisa l’alliance de cette puissance avec la France et l’Italie pour réaliser, a la fois, l’unité italienne et l’unité allemande, et condamna toute compromission avec l’Autriche, dans laquelle il dénonçait l’ennemie irréconciliable de l’unité de l’Allemagne. Sur le rôle de la force dans les révolutions historiques et sur la politique extérieure de la Prusse, Lassalle se rencontrait avec M. de Bismarck.

En 1861, il publia le Système des droits acquis, ouvrage très savant où il malmenait la propriété individuelle et l’hérédité. L’année suivante, il commença la grande campagne d’agitation socialiste à laquelle il consacra le reste de sa vie. Les sociétés coopératives fondées par M. Schulze-Delitsch dans l’Allemagne du Nord avaient donné à leur promoteur une grande influence sur les classes ouvrières ; M. Schulze voulait améliorer le sort de ces classes, en répudiant toute intervention de l’État. Lassalle le combattit avec passion, et multiplia brochures, discours et meetings. Poursuivi pour avoir, dans son Programme des ouvriers, excité les classes pauvres à la haine des riches, il répondit en accentuant dans de nouvelles brochures Les idées incriminées. (V. ses ouvrages intitulés la Science et les ouvriers ; Procès criminel de Lassalle ; l’Impôt indirect tt la situation des classes laborieuses.) Un comité ouvrier, chargé d’organiser à Leipzig un congrès général des travailleurs allemands, s’étant adressé à lui et l’ayant prié d’indiquer la meilleure voie à suivre pour améliorer la