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nomiques ont été réunis en volume par sa veuve, sous le titre : Methods of Social Reform and other papers (i 883). Ce volume offre un grand intérêt. Les idées de Jevons sur l’instruction, sur les amusements populaires, sont souvent fort justes. Parfois il penchait un peu trop en faveur de l’intervention de l’État. Ainsi, dans un article de la Conternporary Review de 1882, il réclamait du législateur l’interdiction du travail de fabrique aux femmes mariées, dont les enfants seraient en bas âge. Il soutint la même doctrine dans son dernier livre : The State in relation to labour (1882).

Un triste accident vint l’enlever à ses travaux en pleine vigueur intellectuelle, dans la force de l’âge. Il se noya à Galley Hill (13 août 1882), Il avait quarante-six ans. M me Stanley Jevons a fait paraître la correspondance de son mari. Ce volume est un nouveau démenti à la théorie qui voit dans dureté et sécheresse de cœur le synonyme d’économie politique (V. Fawcett). Il fait connaître un économiste, qui mérite d’être placé à côté de Mill et de Fawcett, par l’élévation du caractère non moins que par le talent.

A la fin du volume se trouve la liste complète des travaux de Stanley Jevons. Cette énumération donne une idée du travail énorme qu’il a accompli. Plusieurs de ces ouvrages ont été traduits en français, en italien, en allemand, en polonais, et le petit Traité d’économie a été même traduit en langue hindoue. En 1884, le professeur Foxwell a publié les écrits de Jevons sur les questions financières sous le titre : Investigations in Currency and Finance ; enfin parmi ses papiers, on trouva un fragment, qui a paru sous le titre : Principles of Economies. Sophie Raffalovich.

JOVELLANOS (Don Gaspar Melchior de Jovellako, ou) naquit en 1744 à Gijon, d’une vieille famille basque. Encore fort jeune, il se ’it une réputation d’érudit dans les langues savantes, la jurisprudence, la littérature et l’histoire, si bien qu’à vingt-deux ans, l’Académie des beaux-arts de San Fernando tint à l’admettre parmi ses membres.

Par le conseil de l’évêque d’Avila, il reçut les ordres mineurs et eût suivi la carrière ecclésiastique, si le duc de Losada ne l’en eût détourné et n’eût obtenu en 1778 de le faire nommer alcalde de la corte (assesseur de la chambre criminelle) à Se ville. Grâce à l’influence du comte de Florida-Blanco (Voy. ce nom), alors ministre d’État et grand appréciateur de don Melchior de Jovellanos, Charles III l’appela près de lui en qualité de conseiller, le chargeant de suite de plusieurs missions importantes, dont les résultats favorables et inattendus lui valurent un réel crédit jusqu’à la mort du roi. On peut supposer, sans trop s’éloigner de la vérité, que don Melchior de Jovellanos fut l’instigateur des derniers actes du ministère de Florida Blanco ; car celui-ci, bien qu’éclairé et sagace, penchait peu vers les idées nouvelles, qui cependant honorèrent surtout la fin de son ministère.

Le comte Cabarrus (voy. ce nom), un Français moitié financier, moitié agioteur, fondateur du Banco de San Carlos, poussa insensiblement don Melchior de Jovellanos vers l’économie politique. Lors de la disgrâce de Cabarrus, accusé de malversation, Jovellanos, loin de renier son ami, s’efïorça de le couvrir de sa protection, mais en même temps que Cabarrus était jeté en prison, le ministre ’ Lerena relégua Jovellanos à Gijon sous prétexte d’y faire un rapport sur les gisements houillers des Asturies. Quelques biographes ont insinué que le procès de Cabarrus ne fut pas seule cause de cet exil déguisé, mais que don Melchior de Jovellanos avait eu le projet, devant l’épuisement du trésor à la suite de la guerre contre la République française, d’imposer les richesses du haut clergé, et que ce fut l’accusation de sacrilège qui provoqua cette première étape sur la route des vicissitudes que Jovellanos allait suivre désormais. Il faut signaler que, peu de temps après une taxe, légère à la vérité, fut mise sur le septième des biens de l’Église, et cela pour la première fois en Espagne, sans qu’il soit cependant possible d’imputer à don Melchior de Jovellanos la paternité de ce projet. Rentré en grâce auprès de don Manuel Godoy, Cabarrus fit rappeler Jovellanos avec la place de membre du conseil de Castille. Don Manuel Godoy reconnaissant vite un rival, tenta d’abord de l’éloigner en lui offrant l’ambassade d’Espagne à Saint-Pétersbourg, mais sur le refus de don Melchior de Jovellanos, on lui proposa de remplacer Llagunas au ministère de grâce et justice en 1797. De suite, il s’appliqua par d’utiles améliorations à modifier l’instruction, tant primaire que supérieure ; ensuite il s’attaqua à l’Inquisition et voulut soumettre ce tribunal aux règles du droit commun, ce qui équivalait à son anéantissement. Ce projet, déjà émis par un grand inquisiteur lui-même, don Manuel Abady Llamen, évèque d’Astorga, projet qui lui coûta sa liberté, ne réussit pas mieux a don Melchior de Jovellanos ; car il iufc une seconde fois renvoyé à Gijon avec ordre d’y reprendre ses études minières ; peu après il fut arrêté et transporté aux îles Majorque,.