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on intérieure, auxquels il faut ajou- Ces chiffres expliquent l’intérêt q 000 hectolitres importés. Cela suffit che au côté fiscal de la question fabrication intérieure, auxquels il faut ajouter 300,000 hectolitres importés. Cela suffit, sans parler des applications spéciales vinaigres, alcools dénaturés, etc., pour montrer l’activité et l’étendue du mouvement commercial créé par les boissons. Leur régime intéresse par suite une armée d’intermédiaires appliqués aux soins de ce mouvement. Un grand nombre d’entre eux sont soumis à toutes les formalités de l’exercice, les autres ont à craindre constamment les procès-verbaux que fait naitre toute contravention aux nombreuses prescriptions de la loi et des règlements sur le transport, l’entrée, le débit des boissons. On peut dire que ce commerce est entravé à l’intérieur dans une sérieuse mesure par le contrôle fiscal plus encore que par l’impôt lui-même. En ce qui concerne l’exportation, les gênes de la surveillance subsistent, mais l’impôt disparaît par la détaxe ou le drawback. Il est bon de remarquer que la réaction protectionniste qui s’est produite en France depuis 1872 a exercé une action pernicieuse au point de vue du commerce des boissons, en faisant élever, par représailles, les tarifs de douane des pays importateurs dans une mesure sensible. L’Angleterre, notamment, fait tout son possible pour agir sur notre politique économique au moyen de droits établis sur nos vins. La France fait d’ailleurs de même à l’occasion. Nous sommes actuellement en état de guerre économique avec l’un des principaux pays importateurs, l’Italie, qui ne peut plus expédier ses vins en France, sinon par des détours frauduleux.

Le résultat de tout ceci est que le commerce des boissons s’exerce à travers mille entraves ; il garde cependant une extrême importance, à cause de son caractère d’utilité, pour une part, de la vivacité des goûts ou des passions qu’il satisfait, d’autre part. Il est d’ailleurs impossible de le dégager .complètement du contrôle qui le contient de toutes parts, et c’est à peine si l’on peut espérer pour l’avenir une amélioration partielle de sa condition, même en ce qui concerne les boissons alimentaires.

c. Au point de vue fiscal. Les boissons représentent l’une des matières imposables les plus fructueuses pour le Trésor. Elles lui ont fourni en 1888 la somme énorme de 452 millions de francs, savoir les vins et cidres, 147 millions ; les bières, 21 millions 1/2 ; les alcools, 244 millions 1/2 ; les licences, 12 millions ; les droits d’importation, 25 millions. Il y faut ajouter les octrois perçus au profit des communes 100 millions environ, etle total atteindra alors 550 millions.

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Ces chiffres expliquent l’intérêt qui s’attache au côté fiscal de la question. Jamais le Trésor n’abandonnera de telles recettes, assurées par la nature des produits et par l’organisation éprouvée d’un service considérable. Mais nous avons vu d’autre part les inconvénients du régime fiscal des boissons des plaintes nombreuses et fondées en principe rie cessent de s’élever contre l’état actuel des choses, qui est en effet vraiment pénible. L’ensemble des dispositions aujourd’hui en vigueur forme un véritable code dont l’esprit est parfaitement résumé dans ces quelques traits 1. Aucune quantité de vin, de cidre ou d’alcool ne peut circuler sans être accompagnée d’une expédition levée au bureau de la régie. Le transporteur doit déclarer la quantité, les moyens de transport, l’heure de l’enlèvement, les délais, les points de passage, la destination, etc. A toute réquisition, il est obligé de représenter ses congés, passavants ou acquits à caution, lettres de voiture. Le contenu peut être en cours de transport jaugé, dégusté, vérifié. Aux entrées de villes, il faut subir cette série de contrôles, et si les boissons ne s’y arrêtent pas (transit ou passedebout), les mêmes formalités se représentent à la sortie. Chez le marchand en gros, les boissons attendent la présence des employés pour entrer en magasin ; elles sont alors prises en charge et périodiquement recensées. Chez le débitant, des exercices hebdomadaires suivent la vente, les employés peuvent à cet effet pénétrer dans toutes les parties de son habitation pour la recherche des recels ; les fûts sont numérotés, jaugés, marqués, sondés, les alcools pesés et dégustés le prix de vente du vin est affiché les transvasions ne peuvent se faire en dehors de la présence des employés, etc. Nous ne parlons pas de la surveillance permanente des distilleries, effectuée par un poste d’employés logés à l’usine, assistant à toutes les opérations, détenant les clés des robinets, ne permettant aucun travail en dehors de leur présence. Notez que cette rapide énumération laisse de côté un grand nombre de prescriptions et n’esquisse que très incomplètement le joug légal qui pèse sur la production, le transport et la vente des boissons. Une autre difficulté surgit du nombre et de la variété des droits. Il faut distinguer les droits de circulation, trois classes au tarif le droit de détail le droit d’entrée, huit classes pour les vins, autant pour les cidres et les alcools, en tout vingt-quatre classes ; le droit sur la bière, deux classes les licences, douze classes. On voit quelles com1. V. Dictionnaire des Finances, article Boissons, par M. Stourm.