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l’administration leur applique strictes des distillateurs industriels. Il raisins secs, l’administration leur applique un régime analogue à celui des petites distilleries d’alcool. Le contrôle est donc sévère et assez restrictif, mais il est nécessaire pour éviter des abus considérables et faciles à commettre. L’industrie de la bière s’est également développée dans des proportions considérables depuis vingt ans. En ce qui la concerne, le régime fiscal n’est pas très pénible. La surveillance de la fabrication est assez stricte, car l’impôt se paye sur l’évaluation approximative du rendement de chaque opéraiion. Mais dès que le chiffre de la taxe est établi et porté au débit du fabricant, le produit est libre et circule sans difficulté ni entraves. Cet avantage, appréciable, est atténué, d’ailleurs, par ce fait regrettable que l’impôt ne se proportionne pas à la valeur de la boisson. Il reste fixe et par suite devient injuste. L’industrie de la distillerie et celle de la brasserie se lient souvent à titre accessoire aux exploitations agricoles. Le fisc appelle bouilleurs de cru ceux qui distillent l’excédent de leurs vins, cidres et poirés, les marcs et lies de leurs cuves, les fruits de leur récolte. Le régime appliqué à cette fabrication accidentelle a varié. Tantôt on l’a soumise à toutes les rigueurs du contrôle par exercice, tantôt on l’a laissée entièrement libre, et c’est la situation actuelle. La liberté présente un avantage : elle permet à l’exploitant d’utiliser pleinement ses produits et un inconvénient elle facilite singulièrement la vente en fraude des alcools

qu’il en tire. Il est dur cependant d’étendre l’assujettissement fiscal à des centaines de milliers de propriétaires, fermiers, etc., de les entraver dans leurs travaux, de les soumettre aux perquisitions minutieuses des agents. Mais, d’autre part, il est légitime de poursuivre la fraude. Il nous semble possible de trouver un moyen terme, et le meilleur serait peut-être celui qui fait porter le contrôle sur les appareils de distillation. La gêne subsisterait toujours dans une grande mesure, elle s’étendrait même aux fabricants d’alambics, mais dans la pratique le contrôle semblerait moins pénible que l’exercice pur et simple. Ce procédé est employé en Allemagne et aux Etats-Unis.

Certains cultivateurs encore trouvent avantageux de transformer leurs grains et tubercules en alcool plutôt que de les vendre tels quels à des prix médiocres. Ils produisent alors, dans la plupart des cas, des flegmes, ou alcools impurs, qui sont vendus à la distillerie industrielle pour subir une rectification avant d’entrer dans la consommation et sont soumis, à peu de chose près, aux obligations strictes des distillateurs industriels. Il en résulte pour eux une gène assez grande. Mais nous considérons que c’est là un mal léger en comparaison du péril social qui naîtrait d’une liberté permettant à cette catégorie de producteurs de verser dans la con.sommation des produits imparfaits et éminemment dangereux.

Les personnes qui fabriquent de la bière uniquement pour leur usage sont également soumises au contrôle de l’administration et doivent déclarer leurs opérations, sous les peines de droit. C’est en effet un principe rigoureux de notre législatiou fiscale, que toute denrée fabriquée, même par celui qui la consomme exclusivement, reste assujettie à l’impôt. En fait, elles y échappent souvent, mais à leurs risques et périls. Il peut sembler excessif que le particulier qui fait à domicile de la bière pour sa propre table soit taxé et subisse la surveillance fiscale, quand le récoltant de raisin ou de pommes, et même le bouilleur de cru, ne paie rien pour sa consommation personnelle. En Angleterre, où la brasserie domestique s’exerce sur une grande échelle, elle ne donne lieu à aucune perception. Il devrait en être de même chez nous. Notons encore, à ce propos, que si la fabrication ménagère des vins de raisins secs est restée jusqu’à présent à l’abri du contrôle de la régie, elle paye néanmoins une lourde taxe par le fait des tarifs de douane et d’octroi établis sur la matière première. Du reste, l’administration parait résolue à étendre sa surveillance dans cette direction nouvelle. Une circulaire récente prescrit la recherche exacte des fabriques clandestines de vins artificiels. Peut-être ira-t-on jusqu’à surveiller et à taxer la fabrication domestique, chose fâcheuse à notre avis.

Les intérêts commerciaux attachés à la production des boissons seront suffisamment indiqués par quelques chiffres choisis. Le mouvement intérieur des vins, constaté par l’administration fiscale, atteint, bon an mal an, 27 à 28 millions d’hectolitres valant plus de 1,200 millions de francs ; l’importation est de 10 à 12 millions d’hectolitres, l’exportation de 2 millions 6 à 700 mille hectolitres le nombre des marchands en gros

.dépasse 26,000, celui des détaillants approche de 370,000. Pour les cidres, le commerce échange 7 à 8 millions d’hectolitres (le mouvement extérieur est insignifiant). ,L’alcool est versé à peu près intégralement dans le commerce ; l’importation approche de 200,000 hectolitres, l’exportation (en décroissance depuis 1872) se tient aux environs de 300,000 hectolitres. De même pour les 8 millions d’hectolitres de bières de la