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est celle des Mit, une des rares familles du pays où les hommes soient pêcheurs de père en fils ; Jeanne Miniou habite la suivante, et voici, tout au bord de la grève, la maison de l’étrangère qui épousa Antoine Mit.

« Il y a six ans, Antoine Mit, à peine rentré du service, se décida à partir sur la navigation, malgré ses parents qui s’efforçaient de le retenir, et malgré Jeanne Miniou qui voulait l’épouser — et ce fut, peut-être, pour cela, seulement, qu’il s’en alla — tandis que Pierre Le Gall aimait Jeanne sans espoir, il le savait bien. Pierre était aussi un long-courrier.

« Quand Antoine revint, il ramenait une jeune femme de la grande terre. Alors, Jeanne pensa mourir de jalousie et, par dépit, elle consentit à donner sa main à Pierre Le Gall. Deux mois après, Antoine et Pierre trouvaient un engagement sur le même trois-mâts et partaient pour l’Argentine.

« Mais Jeanne ne s’était pas consolée. Et quand Thérèse la mouliguen fut seule, sans son mari, seule dans l’île, personne, malgré qu’elle fût aimable et bonne, ne voulut la connaître. Moi-même, je ne lui aurais pas parlé. Et ses beaux-parents, non plus, ne pouvaient pas la souffrir, parce qu’elle était étrangère.