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tandis que la terre tourne


Car nous jouons parfois. Je te donne mon cœur
Comme un joyau vibrant qui contient des chimères,
Je te donne mes yeux où des images claires
Rament languissamment sur un lac de fraîcheur.

Ce sont des cygnes d’or qui semblent des navires,
Des nymphes de la nuit qui se posent sur l’eau,
La lune sur leur front incline son chapeau
Et ce n’est que pour toi qu’elles ont des sourires.

Aussi, quand tu feras plus tard tes premiers pas,
La rose, le soleil, l’arbre, la tourterelle,
Auront pour le regard de ta grâce nouvelle
Des gestes familiers que tu reconnaîtras.

Mais tu ne sauras plus sur quelles blondes rives
De gros poissons d’argent t’apportaient des anneaux
Ni sur quelle prairie intime des agneaux
Faisaient bondir l’ardeur de leurs pattes naïves.