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SATYRE MÉNIPPÉE.

Mais le sort ne tomba sur aucun d’eux, ains sur un pauvre malotru meneur d’asne, qui, pour haster son miserable baudet tout errené de coups et du fardeau, dit tout haut en voix intelligible ces mots scandaleux et blasphematoires : Allons, Gros-Jean, aux Estats ! Lesquelles paroles ayant esté prises au bond par un ou deux du nombre du Cube Quarré[1], et deferées aux deux promoteurs de la foy, Machault et de Here[2], le blasphemateur fut sainctement et catholiquement condamné à estre battu et fustigé nud de verges à la queue de son asne, par tous les carrefours de Paris : qui fut un prognostic infaillible et avant-jeu signalé pour tesmoigner, à tous les peuples assemblez pour ceste solennelle action, que les procedures de tous les Ordres seroient pleines de justice et d’equité, comme ledit jugement, qui

    président au Parlement de Paris. Il fut arrêté par ordre des Seize, le 15 nov. 1591, et pendu le même jour sans jugement, dans sa prison, avec Larcher, conseiller en la grand’chambre, et Tardif, conseiller au Châtelet.

  1. Les Seize, chefs de la Ligue à Paris ; d’abord au nombre de quatre membres, ils se multiplièrent et devinrent seize, puis plus tard plus nombreux encore. On trouve une variante de cette phrase : « Lesquelles paroles ayans esté prises au bond par un ou deux promoteurs de la foy, Machault et Baston… »
  2. Machault et de Here étaient conseillers en la cour, et tenaient le parti de la Ligue. Le nom de de Here a été supprimé dans les éditions postérieures et remplacé par celui de Baston.