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LA HAINE.

CORDELIA, effrayée.

Et seule ? — Ercole ?…

GIUGURTA, vivement.

En sûreté,… il a pu franchir le rempart !… (Uberta, pendant ce temps, a fermé la tenture de la fenêtre.)

CORDELIA.

Ah ! bien ! bien !… Et Lodrisio ?

GIUGURTA.

Mort !… (Mouvement d’Uberta.)

CORDELIA, joignant les mains.

Dieu !… Ah ! Dieu ! (Silence d’une seconde.)

GIUGURTA.

Ah ! Ne le plains pas, va ! — Il est plus heureux que moi !…

UBERTA.

Pourvu que nul ne t’ait vu !…

GIUGURTA, ôtant ses gantelets et son poignard qu’il pose sur la table, avec son manteau.

Ah ! je ne sais !… J’ai passé la nuit chez les Sozzini !… et j’ai profité pour venir, par les ruelles écartées, de l’heure où ils sont tous au Campo, à se partager nos dépouilles !…

CORDELIA.

Repose-toi !…

GIUGURTA, assis, la tête dans ses mains,

Battu !… Traqué par cette vile canaille !… Moi Giugurta !… Des corroyeurs ! des boucliers, des peigneurs de laine !… Ah ! cet Orso !… (Mouvement de Cordelia.) que j’ai cherché en vain dans la bataille !… Le tenir là ! de ces deux mains,… et lui faire saigner tout son sang… goutte à goutte !…

UBERTA.

C’est fait !

GIUGURTA.

C’est fait ?