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son. Il avait déjà choisi sa place. Il se substituait par la pensée à chacun des orateurs qu’il entendait, jugeait sévèrement leur débit, leur action, et, quand les applaudissements éclataient, il se troublait, et parfois même saluait comme pour remercier. Plus heureux encore pendant son sommeil, il était à la tribune, il récitait d’une voix sonore un discours écouté dans un religieux silence. Le banc des ministres lui souriait. Il retournait à sa place en distribuant des poignées de main. Une nuit, son valet de chambre, réveillé en sursaut, entra tout effaré dans son appartement et le trouva sur son séant, s’agitant, gesticulant, et criant d’une voix glapissante : Je demande la parole pour un fait personnel ! Homme digne d’envie, il avait tous les enivrements de l’ambition sans aucun de ses déboires. Son oisiveté ne connaissait pas l’ennui ; il n’avait pas une heure