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Moserwald, poussé à bout, eut beaucoup de sang-froid et de présence d’esprit. Il me pria de lui donner la bague, et, comme je la lui rendais avec l’affectation d’une restitution légitime, il la remit à son doigt en disant :

— Puisqu’elle devait être jetée aux ordures, je la ramasse, moi. Je ne sais d’où elle sort, mais je sais qu’elle a été purifiée à tout jamais en passant une journée au doigt de madame de Valvèdre ! Et maintenant, qu’elle vaille vingt-cinq sous ou vingt-cinq mille francs, elle est sans prix pour moi et ne me quittera jamais ! Là-dessus, ajouta-t-il en se levant et en me regardant, je pense que ces dames sont fatiguées, et qu’il serait temps…

M. Obernay et M. Valigny ne se retirent pas encore, répondit madame de Valvèdre avec une intention désespérante ; mais vous êtes libre, d’autant plus que vous partez demain matin, j’imagine ! Quant à la bague, vous ne pouvez pas la garder. Elle est à moi. Je l’ai payée et ne vous l’ai pas donnée… Rendez-la moi !

Les gros yeux de Moserwald brillèrent comme des escarboucles. Il crut son triomphe assuré en dépit d’un congé donné pour la forme, et rendit la bague avec un sourire qui signifiait clairement : « Je savais bien qu’on la garderait ! » Madame de Valvèdre la prit, et, la jetant hors de sa chambre sur le palier, par la porte ouverte, elle ajouta :

— La ramassera qui voudra ! elle ne m’appartient