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trouvez pas que la pauvre femme ait assez souffert ?

— Je ne veux pas me battre, je veux conduire Valvèdre auprès de sa femme ; lui seul peut la sauver.

— Comment ? qu’est-ce à dire ? elle le regrette donc ? elle a donc à se plaindre de vous ?

— Elle n’a pas à se plaindre de moi, Dieu merci ! mais elle regrette sa famille, voilà ce qui est certain. Valvèdre sera généreux, je le connais. Jaloux ou non, il consolera, il fortifiera la pauvre âme navrée !

Moserwald retourna à Palerme et mit en observation sur le port les plus affidés de ses gens ; puis il revint occuper mon petit logement afin d’être à portée de nous servir à toute heure. Il fut admirable de bonté, de douceur et de prévenances. Je dois le dire et ne jamais l’oublier.

Alida voulut le revoir et le remercier de son amitié pour moi. Elle ne voulut pas avoir l’air un seul instant de soupçonner qu’il eût été ou qu’il fût encore amoureux d’elle ; mais, chose étrange et qui peint bien cette femme puérile et charmante, elle eut avec lui un accès de coquetterie au bord de la tombe. Elle se fit peindre les sourcils et les joues par Bianca, et, couchée sur sa chaise longue, tout enveloppée de fins tissus d’Alger, elle trôna encore une fois dans la langueur de sa beauté expirante.

Cela était cruel sans doute, car, si elle ne rallumait plus les désirs de l’amour, elle s’emparait encore de l’imagination, et je vis Moserwald frappé d’une douloureuse extase ; mais Alida ne songeait point à cela :