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calme trompeur et qui cachait bien des angoisses toujours renaissantes ; mais l’idée de nous raviser et de nous séparer ne fut jamais remise en question.

Nous prîmes aussi, ce jour-là, de bonnes résolutions, eu égard à notre position désespérée. Nous fîmes de la prudence avec notre témérité, de la sagesse avec notre délire. Je renonçai à mon hostilité contre Valvèdre, Alida à ses plaintes contre lui. Elle n’en parla plus qu’à de rares intervalles, d’un ton doux et triste, comme elle parlait de ses enfants. Nous renonçâmes aux rêves de libre triomphe qui nous avaient souri, et nous prîmes de grands soins pour cacher notre résidence à Paris et notre intimité. Alida prit la peine de s’expliquer avec son mari dans une lettre qu’elle écrivait à Juste, comme Valvèdre s’était expliqué avec elle dans sa lettre à Obernay. Elle persista dans son projet de divorce ; mais elle promit de mener une existence si mystérieuse, que nul ne pourrait se porter son accusateur devant Valvèdre.

« Je sais bien, disait-elle, que mon absence prolongée, mon domicile inconnu, ma disparition inexpliquée pourront faire naître des soupçons, et qu’il vaudrait mieux que la femme de César ne fût pas soupçonnée ; mais, puisque César ne veut pas répudier brutalement sa femme, et qu’il s’agit pour tous deux de se quitter sans reproche amer, celle-ci ménagera les apparences et n’affichera pas son futur changement de nom. Elle le cachera au contraire ; elle ne verra aucune personne qui pourrait le deviner et le trahir ;