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mettre le bonheur et la dignité de la femme que j’aime ? Je crois à votre expérience, vous connaissez mieux que moi la vie pratique. Je vous consulterai, et, si vous me conseillez bien, ma reconnaissance sera éternelle. Toutes mes répulsions pour certains côtés de votre nature seront vivement combattues et peut-être effacées en moi par l’amitié. Il en est déjà ainsi ; oui, j’ai pour vous une réelle affection, j’estime en vous des qualités d’autant plus précieuses qu’elles sont natives et spontanées. Ne me demandez pas autre chose, ne cherchez jamais à me faire accepter des services d’une valeur vénale. Vous n’êtes que riche, dites-vous, et chacun offre ce qu’il peut ! Vous vous calomniez : vous voyez bien que vous avez une valeur morale, et que c’est par là que vous avez conquis ma gratitude et mon affection.

Le pauvre Moserwald me serra dans ses bras en recommençant à pleurer.

— J’ai donc enfin un ami ! s’écria-t-il, un véritable ami, qui ne me coûte pas d’argent ! Ma foi, c’est le premier, et ce sera le seul. Je connais assez l’humanité pour avoir cela. Eh bien, je le garderai comme la prunelle de mes yeux, et vous, comme mon ami, prenez mon cœur, mon sang et mes entrailles. Nephtali Moserwald est à vous à la vie et à la mort.

Après ces effusions, où il trouva le moyen d’être comique et pathétique en même temps, il me déclara qu’il fallait parler raison sur le point capital, l’avenir de madame de Valvèdre. Je lui racontai comment je