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cela, je n’en sais rien. Elle vous connaît encore trop peu, et nul ne peut lire dans l’avenir ; mais vous n’ignorez pas que, dans le cas où cela arriverait, vos parents et les siens s’en réjouiraient beaucoup.

— Henri ne s’en réjouirait peut-être pas ! répondis-je.

— Henri ? lui qui vous aime si ardemment ? Prenez garde d’être ingrat, mon cher enfant !

— Non, non ! ne me croyez pas ingrat ! Je sais qu’il m’aime, je le sais d’autant plus qu’il m’aime en dépit de nos différences d’opinions et de caractères ; mais ces différences, qu’il me pardonne pour son compte, le feraient beaucoup réfléchir, s’il s’agissait de me confier le sort d’une de ses sœurs.

— Quelles sont donc ces différences ? Il ne me les a pas signalées en me parlant de vous avec effusion. Voyons, répugnez-vous à me les dire ? Je suis l’ami de la famille Obernay, et il y a eu, dans la vôtre, un homme que j’aimais et respectais infiniment. Je ne parle pas de votre père, qui mérite également ces sentiments-là, mais que j’ai fort peu connu ; je parle de votre oncle Antonin, un savant à qui je dois les premières et les meilleures notions de ma vie intellectuelle et morale. Il y avait, entre lui et moi, à peu près la même distance d’âge qui existe aujourd’hui entre vous et moi. Vous voyez que j’ai le droit de vous porter un vif intérêt, et que j’aimerais à m’acquitter envers sa mémoire en devenant votre conseil et votre ami comme il était le mien. Parlez-moi donc à cœur