Page:Sand - Valvèdre.djvu/182

Cette page a été validée par deux contributeurs.

rience, et tiens-moi compte de la candeur et de la nouveauté de mes émotions. Va, la jeunesse est une force et un appui dans les grandes choses. Tu verras si, dans des périls d’un autre genre, je suis au-dessous de ton rêve. Faut-il t’arracher violemment à tous les liens qui pèsent sur toi ? faut-il braver l’univers et m’emparer de ta destinée à tout prix ? Je suis prêt, dis un mot. Je peux tout briser autour de nous deux… Mais tu ne le veux pas, tu m’ordonnes d’attendre, de me soumettre à des épreuves contre lesquelles se révolte la franchise de mon âge ! Quel plus grand sacrifice pouvais-je te faire ? Je fais de mon mieux. Prends donc pitié de moi, cruelle ! et toi aussi, prends donc patience !

« Pourquoi envenimer ces douleurs par ton injustice ? pourquoi me dire qu’Adélaïde ?… Non ! je ne veux pas me souvenir de ce que vous m’avez dit. C’était insensé, c’était inique ! Une autre que toi ! mais existe-t-il donc d’autres femmes sur la terre ? Laissons cette folie et n’y reviens jamais. Parlons d’une circonstance qui m’a bien autrement frappé. Tes deux enfants vont demeurer ici… Et toi, que vas-tu faire ? Cette résolution de ton mari ne va-t-elle pas modifier ta vie ? Comptes-tu retourner dans cette solitude de Valvèdre, où j’aurais si peu le droit de vivre auprès de toi, sous les regards de tes voisins provinciaux, et entourée de gens qui tiendront note de toutes tes démarches ? Tu avais parlé d’aller dans quelque grande ville… Songe donc ! tu le peux à présent. Dis, quand pars-tu ?