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de la nuit. Le bruit des cascades de la montagne, la magie du clair de lune aidèrent au prestige ; Alida fut vivement émue, les fiancés eux-mêmes m’écoutèrent avec intérêt. Quand je rentrai, le bon Obernay m’accabla d’éloges ; la candide Paule aussi se fit la complice de mon succès. Madame de Valvèdre ne me dit rien ; elle dit aux autres à demi-voix — mais je l’entendis bien — que j’avais le talent le plus sympathique qu’elle eût encore rencontré.

Que se passa-t-il durant les deux jours qui suivirent ? Je n’eus pas la hardiesse de me déclarer et je fus compris ; je tremblais d’être repoussé si je parlais. Mon ingénuité était grande : on lisait clairement dans mon cœur, et on se laissait adorer.

Le troisième jour, Obernay me prit à l’écart après le départ des fusées.

— Je suis inquiet et je pars, me dit-il ; le signal que je viens d’expliquer à ces dames comme n’annonçant rien de fâcheux était presque un signal de détresse. Valvèdre est en péril ; il ne peut ni monter ni descendre, et le temps menace. Pour rien au monde, il ne faut inquiéter Paule ni avertir Alida ; elles voudraient me suivre, ce qui rendrait tout impossible. Je viens d’inventer une migraine, et je suis censé me retirer pour dormir ; mais je me mets en route sur l’heure avec les guides, qui, par mon ordre, sont toujours prêts. Je marcherai toute la nuit, et, demain, j’espère rejoindre l’expédition dans l’après-midi. Tu le sauras, s’il m’est possible de t’envoyer une fusée