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suite au noviciat. On lui fit comprendre avec peine qu’elle était trop jeune et qu’en attendant elle devait travailler à s’instruire.

Elle travailla pendant un an, mais sans suite et comme une personne dont le cerveau n’est pas susceptible de la moindre application. Les maîtresses me dirent qu’elle n’était pas méchante, mais un peu idiote. Elles ne se trompaient qu’à demi : elle est idiote et méchante.

Je ne demandais qu’à les croire, et je fus dupe de sa soumission. Elle écrivit à son père une lettre sans style et sans orthographe, comme l’eût écrite une enfant de six ans, pour lui dire qu’elle était décidée à entrer en religion l’année suivante, et qu’elle demandait seulement à revoir la chambre de sa mère et à embrasser Léonie, sa petite sœur. Je priai M. de Nives de lui accorder cette grâce, et je lui offris d’aller la chercher. Il s’y refusa énergiquement.

« — Jamais ! me dit-il. Elle m’a menacé, au lendemain de la mort de sa mère, de mettre le feu à la maison, si je me remariais. Elle voulait me faire jurer de ne pas lui donner une marâtre. Elle avait la tête remplie de propos de laquais sur votre compte. Elle se promettait, si j’avais d’autres enfants, de les étrangler. Elle est folle, et d’une folie dangereuse. Elle est bien au couvent, la religion est le seul frein qui puisse la calmer ; écrivez-lui que j’irai la voir dans quel-