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reusement dans les siens, s’écrie en riant qu’il était couché et qu’il s’en est fallu de peu qu’il ne prît son fusil pour me recevoir. Au vacarme que faisaient ses chiens, il avait cru à l’approche d’un voleur. Il s’empare de Prunelle, et, toujours à moitié nu, la conduit lui-même à l’écurie, où je le suis pour l’aider à la débrider.

» — Laisse, laisse-moi faire, me dit-il ; tu n’y verrais pas. Moi, je vois la nuit comme les chouettes, et puis je sais où tout se trouve. En effet il arrange tout dans les ténèbres, donne de l’eau, du grain, du fourrage à sa petite amie Prunelle, revient sans avoir éveillé personne, distribue de plantureux coups de pied à ses chiens qui grognent encore après moi, et me fait entrer dans son pavillon, dont le seul luxe consiste en fusils de tout calibre et pipes de toute dimension. Pas un livre, pas d’encrier, pas de plumes, absolument comme dans sa chambre d’étudiant au quartier latin.

» — Ah çà, depuis quand es-tu arrivé au pays ?

» — Depuis tantôt dans l’après-midi.

» — Et tu viens me voir tout de suite ? C’est gentil, ça ! et je t’en remercie. On va bien chez toi ? Ma foi, il y a bien un grand mois que je n’ai vu tes parents. J’ai tant à faire ici ! Je ne peux pas quitter ; mais ils savaient où je perche depuis ce temps-là, puisque tu viens m’y surprendre ?