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— Ces gens décidés ne se font-ils pas connaître tout de suite, pensait-elle, et ne faut-il pas leur savoir gré de vous épargner les tourments de l’hésitation ? Pierre a du respect pour moi, c’est flatteur et c’est bon ; mais n’en a-t-il pas trop ? Veut-il donc que je fasse les avances ? est-ce qu’il n’est pas dans l’ordre des choses que l’homme ait l’initiative ?

Marianne se sentait poussée et comme réclamée par un penchant très-logique et très-vrai, celui qui porte le sexe faible à estimer avant tout, dans le sexe fort, les résolutions qui caractérisent la virilité. Elle avait tressailli d’aise lorsque Pierre avait saisi avec autorité la bride de son cheval pour la retenir ; mais Philippe n’eût pas lâché prise, elle le sentait bien, et Pierre n’avait eu qu’une velléité de courage. Pourtant ces deux larmes qu’il n’avait pu retenir,… Philippe ne les eût pas versées.

— Peut-être que sa timidité est la conséquence forcée de la mienne, se dit encore Marianne. Jamais je n’ai su dire un mot, ni même avoir un regard pour lui faire deviner que je voudrais son amour. Je suis trop fière, il me croit indifférente ou stupide. Est-ce qu’il m’aimerait franchement si j’étais coquette et un peu hardie ? Qui sait ?

Pierre reprenait de son côté le chemin de Dolmor sans songer davantage à surveiller Phi-