Page:Sand - Tour de Percemont.djvu/171

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

affaire, je vais dès demain agir pour mettre fin à une situation fâcheuse et ridicule.

— Agir ? Ah ! mon oncle, qu’allez-vous faire ? Avertir madame de Nives ? perdre cette pauvre enfant !…

— Pourquoi viens-tu l’accuser ?

— Mon Dieu, je ne l’accuse pas ! Je me plains, voilà tout ; mais j’aimerais mieux me couper les deux mains que de lui nuire. Si vous saviez comme avec tout cela elle est grande et bonne ! Elle en est absurde, elle en est romanesque !

— Pourtant si elle te plante là, si, après t’avoir bercé de ses projets mystiques, elle prend un mari, et que ce mari ne soit pas toi ?

— Eh bien ! mon oncle ?

— Ne te vengeras-tu pas ?

— Non, jamais ! Ce jour-là, je me saoulerai comme un Polonais ou j’épaulerai mon fusil de chasse avec mon pied, je ne sais pas ! mais lui faire du tort, à elle, la vilipender, la trahir,… non ! Je ne pourrais pas. Ce n’est pas une femme comme une autre, c’est un ange, un ange bizarre, un ange fou, il y en a peut-être comme cela ; mais c’est le bon cœur, la bonne intention, le désintéressement, la charité en personne. Ce qui serait mal pour une autre ne l’est pas pour elle. Non ! il ne faut pas la perdre ; non, mon oncle, mettons que je ne vous ai rien dit.

— Allons, répondis-je en prenant la main de