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rançonner aussi, elle n’allât vendre votre secret à la comtesse de Nives. J’ai refusé son secours et n’ai plus compté que sur moi-même pour vous délivrer. Il est vrai que le hasard m’a bien servi, car je ne sais pas encore pourquoi vous vous êtes trouvée derrière cette palissade.

» — Je vais vous le dire, répondit-elle. Tout était convenu pour mon évasion cette nuit même. J’étais déjà munie du déguisement d’ouvrière où vous me voyez. Je devais me trouver à minuit à la porte du grenier, ma cellule est très-près de là, et il m’était facile de m’y rendre. J’y étais donc à minuit, mais je grattai en vain à cette porte, je frappai même avec précaution ; elle ne s’ouvrit pas, et rien ne me répondit. J’y restai un quart d’heure, dévorée d’inquiétude et d’impatience. Je me dis alors que le mari de la Charliette avait surpris notre secret et qu’il avait enfermé sa femme. Pourtant vous deviez être là, vous, et vous m’auriez parlé à travers la serrure. Au besoin, vous eussiez enfoncé la porte. Il fallait que quelque accident sérieux vous fût arrivé. Je ne peux pas vous dire ce que j’imaginai de tragique et d’effrayant. Je ne pus supporter cette angoisse, et je résolus d’entrer chez la Charliette par le potager afin de savoir ce qui se passait entre vous. J’ai escaladé un treillage le long du mur qui sépare notre parterre du potager. Je suis légère et adroite : parvenue