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voir mes hôtes à ma table et de les voir servis à mes frais aussi largement que moi-même.

» La nuit venue, je sortis en emportant une clef de la maison, et j’allai à un rendez-vous. Ceci ne vous intéresse pas, mon oncle, mais je suis forcé de vous le dire pour vous expliquer la conversation que j’eus le lendemain soir avec la Charliette.

» Son mari était descendu à l’atelier, et je restai attablé avec elle, savourant une eau de coing de sa façon qui était vraiment délicieuse, dix ans de bouteille au moins, lorsqu’elle me dit :

» — Vous allez donc encore courir ce soir et rentrer à des trois heures du matin ? Pauvre garçon ! vous vous ruinerez le corps à ce métier-là, et vous feriez mieux de vous marier. Est-ce que vous n’y songez point ?

» — Ma foi non, répondis-je. Je n’ai pas fini d’être jeune.

» — Mais quand vous ne le serez plus, il sera trop tard, et vous ne trouverez plus que du rebut. Si vous vouliez devenir raisonnable, pendant que vous êtes encore jeune et beau, je vous trouverais peut-être un parti au-dessus de toutes vos espérances.

» Je me moquai d’abord de la Charliette, mais elle m’en dit tant que je fus forcé de l’entendre. Il s’agissait d’une fortune de plus d’un million,