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Scène V

BERNARD, FRANCINE.
BERNARD.

J’ai pas rêvé, Francine ? Tu m’as appelé ?

FRANCINE.

Oui. Écoutez-moi. Vous ne m’aimez point, ou vous m’aimez très-mal, comme un homme sans bonté et sans religion peut aimer. Vous m’avez trompée la première fois. Je vous croyais de bonne parole. Vous êtes revenu au bout d’une heure, et ce que vous m’avez proposé, c’est infâme, entendez-vous ?

BERNARD.

Doucement ; laissez-moi dire aussi, Francine. Je suis revenu parce que votre père me demandait, et je ne vous ai vue alors que devant lui, après lui avoir parlé ; ainsi, je n’ai pu vous offenser en aucune manière.

FRANCINE.

Si vous ne vous souvenez pas de ce que vous dites et des personnes à qui vous parlez, comment donc faire pour s’entendre avec vous ?

BERNARD.

Si je vous respectais pas comme je respecte ma sœur, je vous dirais que c’est vous, Francine, qui rêvez des choses qui ne sont pas.

FRANCINE.

Allons, c’est inutile de vous parler. Sans doute que le vin vous enlève toute idée d’un moment à l’autre.

BERNARD.

Le vin ? J’ai fait serment, il y a un an, de n’en plus goûter, non plus qu’aux autres choses qui font perdre la raison, et j’ai tenu parole, je le jure !

FRANCINE.

Vous n’étiez pas ivre quand mon père est rentré ?