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LE FAUX BERNARD.

C’est-il honnête, le droit de prise ?

ANDRÉ.

En guerre… oui !

LE FAUX BERNARD.

Eh bien, voilà, écoute.

ANDRÉ.

Vous me tutoyez ?

LE FAUX BERNARD.

C’est par amitié, beau-père.

ANDRÉ, un peu hébété.

Beau-père ! décoré, cinquante mille francs !… Je ne sais pas si je dors ou si je veille. Tu disais ?…

LE FAUX BERNARD.

Là-bas, à la guerre, un pirate est tombé entre nos mains. Il avait trois femmes, c’était un Turc. Le capitaine a pris la plus jeune, le lieutenant a pris la seconde… Restait la plus vieille, dont personne ne voulait, car elle n’avait plus que trois dents et un œil, ce qui ne l’empêchait pas d’être bossue des deux épaules et boiteuse des deux jambes… Mais moi qu’avais compris des mots de leur chienne de langue… (André reste en extase devant les coquilles.)


Scène X

LE FAUX BERNARD, ANDRÉ, LE DRAC.
LE DRAC, au fond, derrière la porte vitrée.

Que fais-tu là, esprit fantasque ?

LE FAUX BERNARD.

J’embrouille et j’amuse, je complique et j’éblouis. Je trace le rêve dans le cerveau de ma proie. C’est le livre où je peins ma fantaisie ; c’est le miroir, je suis l’image !

LE DRAC.

Dans quelle extase plonges-tu ce vieillard ?

LE FAUX BERNARD.

J’obéis à des lois que les hommes ne peuvent deviner. C’est