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camps. Il m’a fait homme de bien, il t’a fait heureux… Le bon Dieu, en lui donnant une femme comme Sylvia, avait acquitté nos dettes en notre place ; voudrais-tu donc l’aborder, à son lit de mort, peut-être, avec une mauvaise pensée dans le cœur ?

FABIO.

Non… non. Ergaste ! ce que tu me dis là, ma conscience me l’avait crié cent fois pendant que j’errais tristement sur les chemins, à la poursuite d’un bien dont je n’étais point digne… Je sais, d’ailleurs, que les personnes retenues méprisent les comédiens, parce que les comédiens ont souvent des mœurs aussi relâchées que les gens de cour, et je sens bien qu’il nous faut reprendre notre rang parmi les hommes par des actions bien réglées, afin que notre exercice ne nous soit plus imputé à blâme. Va, tu seras désormais content de moi, honnête homme ! (Ergaste l’embrasse.) La fierté, si ce n’est la vertu, me soutiendra. Allons voir Marielle !

ERGASTE.

Oui ; car il me tarde de courir chercher Sylvia.

FABIO.

Je sais que je ne dois point m’offrir à t’accompagner… Mais comment feras-tu ? un couvent cloitré, bien gardé sans doute… Emmène Florimond… il est résolu autant que prudent…

ERGASTE.

Je ne sais point ce que je vais faire : mais, quand je devrais mettre le feu à tous les couvents de la chrétienté, je la ramènerai, notre Sylvia !


Scène IX

FABIO, ERGASTE. SYLVIA, SŒUR COLETTE.
SYLVIA, qui a entendu les dernières paroles d’Ergaste.

Votre Sylvia, elle est ici, ô mes amis ! (Elle se jette dans les bras d’Ergaste et tend la main avec franchise à Fabio.)