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LE DRAC.

L’orphelin n’est plus, et moi, Francine, moi qui t’aime, j’ai pris sa figure.

FRANCINE.

Tu as pris… ? Mais qui est-ce que tu prétends être ?

LE DRAC.

Je suis le drac, Francine, le drac du cap Mouret.

FRANCINE, effrayée.

Toi ?… Tiens, j’ai peur de tes yeux !… Tu n’as pas tes yeux des autres fois… Tu as la fièvre !

LE DRAC.

Malheur ! je n’avais pas prévu qu’elle ne voudrait pas, qu’elle ne pourrait pas me croire !

FRANCINE, à part.

C’est qu’il ne parle plus comme il a coutume de parler ! (Haut.) Où prends-tu tout ce que tu dis ?

LE DRAC.

Dans une nature supérieure à la tienne. Voyons, pour me croire, il te faut des preuves ?

FRANCINE.

Quelle preuve peux-tu me donner ?

LE DRAC.

N’as-tu pas rêvé la nuit dernière d’un enfant blanc couronné de fleurs, qui courait sur l’eau comme tu cours sur la terre ?

FRANCINE, se parlant à elle-même.

Je n’ai dit ça à personne !… et c’est vrai, je l’ai rêvé !

LE DRAC.

Ce médaillon que tu portes toujours…

FRANCINE, vivement.

C’est des cheveux de mon frère, qui s’est marié et qui est allé demeurer à Nice !

LE DRAC.

Tu mens, Francine, ce sont des cheveux de Bernard.

FRANCINE.

Ah ! ne dis pas ça ! Si mon père l’avait su…