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mieux que vous !… Et cette émotion fût restée douce, votre union m’eût comblé de joie… jamais je n’aurais su que je pouvais regretter d’être venu si tard dans la vie de la femme que vous aimiez… Mais vous ne l’aimiez pas !

HENRI.

Grand Dieu !… je ne l’aimais pas !…

LA HYONNAIS.

Non, vous ne l’avez jamais aimée !… Et pourtant mon devoir était de vous rattacher à elle, et, jusqu’à ce jour, jusqu’à ce moment, au milieu de mille angoisses, en dépit de mille tortures, je me suis efforcé de la rattacher à vous. Ah !… je n’ai que trop réussi auprès d’elle !… Mais, puisque, auprès de vous, mon sacrifice est inutile, puisque vous ne trouvez point en vous-même la force de la mériter,… eh bien, je vous le déclare, Henri, je ne suis plus maître de ma volonté, je ne peux plus étouffer le cri de mon âme… Le courage, la douceur, l’intelligence, le charme, la beauté morale de cette femme se sont emparés de moi. C’est une passion, c’est une adoration, c’est une fièvre et une extase, c’est de l’amour enfin ! Et, si vous revenez loyalement à elle, je vous dirai adieu à tous deux pour toujours. Mais, si c’est le contraire, je jure que je ne la quitterai plus, que je la protégerai, que je vengerai ses injures, que je la servirai, et que je ferai tout au monde, oui, le possible et l’impossible, pour mériter son affection.

HENRI, troublé.

Ah !… vous seriez un rival redoutable !… car, je le vois, vous l’aimez éperdument !…

LA HYONNAIS.

Un rival ?… Oh !… quel mot dites-vous là, Henri ?

HENRI.

Jacques !… tiens !… je ne sais ce que je dis !… je ne sais quel vertige s’empare de moi. Je ne sais pourquoi celle passion que tu me laisses voir me fait tant de mal !… Mon Dieu !.… qu’est-ce donc qui se passe dans ma pauvre âme ?… Elle se déchire, elle se brise !… J’ai renoncé à la plus belle, à la