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été faible, j’ai été lâche. J’ai laissé deviner cet amour que j’étais fière d’avoir su vaincre et cacher. Ah ! ne comprenez-vous pas que, depuis ce jour-là, je suis comme brouillée avec moi-même !… Je me déplais, je me déteste, je me sens humiliée !… Le passé me devient amer… Des souvenirs si purs !… un silence si patient !… Je croyais n’avoir jamais à regretter qu’un beau rêve, et à présent, tenez… je rougis de mes larmes !

LA HYONNAIS, très-ému.

Non ! non ! vous ne devez pas rougir d’avoir si vaillamment souffert et si saintement aimé ! Rougir, vous ! quand cette fierté qui pourrait s’indigner n’accuse qu’elle-même et semble demander pardon à Dieu de sa propre douleur ! Ah ! tout ce que vous éprouvez, tout ce que vous dites, vous rend plus digne de respect et… d’amitié.

FRANÇOISE, lui tenant la main.

Vous pleurez avec moi !… vous êtes bon, vous !… oh ! bien bon !… je le vois… je le sais !…

LA HYONNAIS.

Que cherchez-vous ?

FRANÇOISE, qui cherche dans son mouchoir et dans son bouquet.

Je ne sais pas… On m’a remis… j’ai perdu…

LA HYONNAIS.

Quoi donc ?

FRANÇOISE.

Comme j’entrais dans le bal, quelqu’un, le duc de Belver, je crois… j’étais si préoccupée !… m’a glissé un billet dans la main. Il déteste Henri : ce doit-être quelque chose contre lui… Ah ! le voilà !…

Elle retrouve le billet sur la causeuse.
LA HYONNAIS.

C’est peut-être l’explication de l’air de triomphe de M. Dubuisson… Le duc est peut-être un des créanciers d’Henri… Lisez…

FRANÇOISE, essuyant ses yeux.

Je ne peux pas… je ne vois pas… Lisez, vous !