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CLÉONICE, assise à gauche.

C’est, au contraire, une preuve de déférence dont je vous sais gré. (Henri la regarde, étonné.) Je parle sérieusement ! Profiter de l’occasion pour faire l’aimable et le coquet avec une héritière, c’est le fait des jeunes gens de province. Moi, je n’ai bonne opinion que de ceux qui ne s’occupent pas de moi.

HENRI, à part, écrivant et écoutant.

Eh ! ce n’est pas trop bête !

CLÉONICE, à part.

Il ne m’entend seulement pas. Voyons donc si je l’arracherai à sa méditation. (Haut, se levant. ) Ah ! voilà Françoise !… Non, je me trompe : elle s’en va. Est-ce que… ? (À Henri, qui s’est levé.) Est-ce que je ne suis pas indiscrète de la venir voir aujourd’hui ?

HENRI.

Aujourd’hui ! pourquoi cette question ?

CLÉONICE.

Mon Dieu, sur quel ton de dépit ou de chagrin vous me dites cela !

HENRI, étonné et contrarié.

Moi ? Mais, vraiment, mademoiselle, vous êtes très-railleuse.

CLÉONICE.

Moi, railler une inclination ?… Dieu m’en garde ! Heureux ceux qui peuvent obéir à leur penchant !

HENRI.

Vous n’aurez pas ce bonheur-là, vous. La grande richesse est un obstacle à la liberté du choix !

CLÉONICE, à part.

Est-ce une allusion ? (Haut.) Oh ! il n’est pas question de moi. Je ne suis guère intéressante, car il se trouve que je suis gâtée au point de pouvoir choisir qui bon me semble.

HENRI.

Ah ! vous êtes libre à ce point ? et vous allez sans doute bientôt écouter ce jeune cœur ?