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CAROLINE.

J’étais si jeune quand je l’ai perdue, que je ne me la rappelle pas. J’ai été nourrie et élevée par une excellente femme dont le mari était l’homme de confiance de mon père. Ces braves gens étaient comme de la famille ; quand nous avons été ruinés, j’ai dû me séparer d’eux, à mon grand chagrin.

LA MARQUISE.

Et votre sœur ?

CAROLINE.

Ma sœur a épousé un homme qui l’aimait et dont un emploi faisait toute la fortune. Tant qu’elle a pu me donner l’hospitalité, elle l’a fait. Son mari est mort jeune, lui laissant quatre enfants. C’est à mon tour de lui venir en aide.

LA MARQUISE.

Avec dix-huit cents francs ? Mais c’est impossible ! Dix-huit cents francs pour six personnes ! Madame d’Arglade ne m’avait pas dit cela !

CAROLINE.

À la campagne, on vit de si peu !

LA MARQUISE.

A la campagne, à la campagne ! Voyons, nous tâcherons d’arranger ça !

CAROLINE, lui baisant la main.

Ah ! madame ! que j’aie ou non le bonheur de vous convenir, laissez-moi vous dire que vous êtes bonne !

LA MARQUISE.

Et moi, je ne vous vois encore que des qualités, des vertus même. Passons aux défauts ; il faut que je vous en trouve, sous peine de me ruiner : êtes-vous légère ? êtes-vous coquette ?

CAROLINE.

Je ne suis ni coquette ni légère, madame.

LA MARQUISE.

C’est que j’ai de graves raisons pour vous demander ça. En prenant chez moi une jeune et jolie personne, j’accepte une