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MARGUERITE.

Vous vous piquez d’audace, je le sais !

DE LUNY.

Et de persévérance, quand on me met au défi,

MARGUERITE.

Au défi ? Monsieur de Luny, écoutez, vous avez cru que je vous haïssais, vous vous êtes trompé, je ne hais personne. Votre réputation d’homme dangereux… de tout temps, vous y avez tenu, convenez-en ; et, si j’eusse parlé de vous, comme d’un personnage sans conséquence, vous en eussiez été peu flatté ; ne faites donc pas semblant de m’en vouloir. Vous me pardonnez sans effort, et, en qualité d’honnête femme de province, j’ai tous les droits possibles à votre indifférence.

DE LUNY.

Voilà, madame, quant au dernier point, ce qu’il m’est impossible de vous accorder.

MARGUERITE.

Vous m’accordez le reste ?… Pourtant, attendez, j’ai dit un mot, un seul mot qui vous a irrité contre moi.

DE LUNY.

Je ne m’en souviens pas.

MARGUERITE.

Si vraiment ! j’ai fait allusion à votre âge ; en cela, j’ai eu tort, j’ai dit une bêtise. Du moment que vous avez, à peu d’années près, je crois… l’âge de mon mari, j’ai fait une sotte plaisanterie, et j’en demande pardon à lui et à vous.

DE LUNY.

Madame, c’est trop de douceur et de bonté ! vous voulez m’ôter tout prétexte pour vous attaquer.

MARGUERITE.

Pour m’attaquer ?

DE LUNY.

Dans la forteresse de vos préventions.

MARGUERITE.

Je n’ai ni préventions ni forteresse ! j’aime mon mari, voilà tout !