Page:Sand - Theatre complet 4.djvu/289

Cette page n’a pas encore été corrigée

CYPRIEN.

Vous m’ôtez tout à la fois le présent, l’avenir… et jusqu’à votre estime, car vous m’attribuez des projets de séduction qui me blessent jusqu’au fond de l’âme.

MARGUERITE.

Tu n’as pas ces projets-là : j’en suis persuadée ; mais vous êtes deux enfants, et vous ne savez pas à quoi peut entraîner une passion à laquelle on s’obstine à donner le change. Ça a pu durer un an dans une vie calme ; mais, après ce qui s’est passé aujourd’hui, l’équivoque n’est plus possible, il faut vous séparer pour toujours.

CYPRIEN, se levant.

Eh bien, voilà à quoi je ne peux pas m’engager. Je vous tromperais, je me tromperais moi-même.

MARGUERITE.

Donc, tu es faible d’esprit et de cœur. Tu n’as ni conscience ni amour.

CYPRIEN.

Ni amour !

MARGUERITE.

Non, tu n’aimes pas ! la preuve, c’est cette fièvre, cette révolte où je te vois. Tu sais que tu ne peux pas revoir cette enfant sans la perdre, ne fût-ce que dans l’opinion, et tu veux la revoir à tout prix.

CYPRIEN.

Et vous, vous voulez la cacher si bien que je ne retrouve jamais sa trace ! Oh ! dites-le ! je m’attends à tout ! vous voulez l’ensevelir vivante dans un cloître, la séparer de moi par des vœux éternels !… mais je m’y oppose, moi ; je la chercherai, je la découvrirai !…

MARGUERITE.

Et quand tu l’auras trouvée ?…

CYPRIEN.

Je mettrai le feu au couvent, s’il le faut ! et je l’enlèverai.