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MARCASSE.

Je n’ai point peur ! je vous dirai tout. Mauvaise action ! Edmée si pure, un vrai diamant ! je l’avais sauvée, moi ! Vous la perdez, cœur injuste, esprit malade ! Vous êtes bien coupable, monsieur ! Fort méchant dans la colère ; continuez comme ça, vous êtes perdu.

BERNARD, peu à peu brisé par les reproches de Marcasse.

Perdu ! oui, je le suis, car elle me hait ! Elle me dédaignait, et, à présent, elle me brave ! Eh bien, moi aussi, je veux braver son aversion et mépriser en moi cette passion insensée ! Oui, oui, je mettrai le pied sur la tête du serpent qui ronge mes entrailles ! Marcasse, allez dire à Edmée… Non ! ne lui dites rien.

MARCASSE.

Que voulez-vous faire ?

BERNARD.

Je ne sais pas ! je veux la fuir… l’oublier… ne jamais la retrouver comme, un obstacle, comme un écueil funeste dans ma vie ! Oui, il y a longtemps que je sens qu’elle m’absorbe, qu’elle m’avilit, qu’elle me tue ! Je me lasse à la fin de cette honte !… Tenez, écoutez-moi. (Il arrache de son doigt l’anneau d’Edmée.) Voilà une bague… c’est sa liberté que je lui rends, c’est sa parole… dont je ne veux plus ! c’est mon dernier adieu… Dites-lui qu’elle n’entendra plus jamais parler de moi !

MARCASSE.

Mais où allez-vous ?

BERNARD.

Qu’importe ? J’irai chercher la force, la volonté, l’énergie, l’émotion… la guerre, à l’autre bout du monde s’il le faut !

MARCASSE, rêveur

Oui… il faut…

BERNARD, sans l’écouter.

Il est bien temps, mordieu ! que je sois un homme ! Allons, Bernard, réveille-toi ! La lutte, le danger, la souffrance ! Rage et malheur ! comme on disait à la Roche-Mauprat…