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que je tiens à la grâce d’une révérence ou à la science des mots : je tiens à ce que vous profitiez de ce qu’il y a d’utile et de sérieux dans l’éducation qu’on vous offre, l’amour du bien, l’horreur du mal.

BERNARD.

Qu’ai-je besoin de savoir ce qui est bien ou mal dans les conventions de votre monde ? Je sais que je ne suis pas méchant et que je vous aime, voilà tout ! Vous voulez que j’apprenne à vous le dire comme il faut ? Moi, je ne connais qu’une idée, qu’un mot, c’est je vous aime !

EDMÉE.

Il n’est pas de meilleure manière de le dire, il n’est pas de mot plus grand et plus beau que celui-là ; mais il faut savoir ce qu’il signifie.

BERNARD.

Je le sais de reste ! Il signifie que je veux être aimé de vous.

EDMÉE.

L’amour ne s’impose pas, Bernard, il s’obtient !

BERNARD.

Il faut donc obéir toujours pour être aimé ?

EDMÉE.

Et si je vous disais que oui, m’obéiriez-vous ?

BERNARD.

Certes ! mais, à mon tour, je vous dirais : Aimez-moi, je vous l’ordonne ! Voyons ! n’ai-je pas fait tout ce que vous vouliez ? Je ne voulais pas vous suivre chez votre père, et je vous y ai suivie ; je ne voulais pas écouter les leçons de votre pédagogue, et je les écoute ; je ne voulais pas accepter vos dons, et je les accepte ; je voulais étrangler M. de la Marche et je ne l’ai pas fait ! Vous voyez bien que ma soumission ne me sert de rien et que vous me trompez, puisque vous continuez à en aimer un autre que moi !

EDMÉE.

Je vous ai dit le contraire.