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de chasse brisé dans sa main.) Et je suis harassé… Criblé… Mais, tel que je suis, vous ne me livrerez pas vivant, je vous en réponds.

PATIENCE.

Vous livrer ? Non ! Vous êtes chez moi, c’est sacré ! Entrez, reposez-vous ; on vous cachera s’il le faut. (Refermant la porte.) Ah ! le malheureux ! il laisse une trace de sang derrière lui.

M. AUBERT.

Secourons-le !

BERNARD, soutenant Léonard et le faisant asseoir.

Dites-nous… Oh ! Léonard, dans quel état vous êtes !

LÉONARD.

Rien !… rien !… Laissez-moi reprendre haleine ! Tout est perdu. Bernard ! vous vous êtes sauvé… (Regardant Edmée.) Tant mieux pour vos amours ! tant pis pour votre conscience !

BERNARD.

Non ! j’ai eu pitié d’une femme, voilà tout ; mais me voilà prêt… Je retournais là-bas… J’y cours !

LÉONARD, d’une voix entrecoupée.

Il est trop tard ! Tout est fini ! Tous mes frères sont morts ou prisonniers, et la Roche-Mauprat est la proie des flammes. J’ai vu tomber à mes côtés Louis, Laurent et Antoine. Je soutenais le dernier assaut avec Gaucher. (Il se lève.) Entourés, perdus, abandonnés…, nous n’avons pas voulu nous rendre, nous avons sauté dans le fossé… Gaucher n’a pu le traverser… je l’ai vu disparaître ! Rage et malheur ! quelle nuit !… Je me suis frayé un chemin à travers les balles ; aucune ne m’a fait tomber, je ne sentais plus rien ! On m’a traqué jusqu’à cinq cents pas d’ici… Là, j’ai trompé ces limiers maudits ; mais ils ne tarderont pas… Tenez ! ils viennent ! Une arme, Bernard !… une arme, vous autres ! un épieu ! un bâton !…

EDMÉE.

Non !…. écoutez !… Cette fanfare… ce sont les gens de mon père ! on me cherche. (À Léonard.) On vous sauvera, mon-