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eaux ; c’est devenu la mode de faire ici des parties de campagne, et cette mode-là nous rapporte gros dans la saison des bains. Ah çà ! j’espère que tu vas déjeuner chez nous ?

FLAMINIO.

Mais pourquoi pas ?

RITA.

Oh ! tant mieux ! nous allons te servir. (À Joseph qui revient.) Qu’est-ce que c’est ? Une pratique ?

JOSEPH.

Non, c’est un monsieur qui n’est pas cousu d’or, car il marchande d’avance son déjeuner.

Rita regarde le personnage, auquel Flaminio ne donne pas d’attention.
RITA.

C’est peut-être bien un avare ; il en a la tournure !

FLAMINIO.

Eh bien, donnons-lui une leçon ou un secours. Servez-nous bien. Je vas m’amuser à l’inviter. (Il va au personnage, qui s’est assis devant une table, la tête dans ses mains, d’un air accablé. Rita et Joseph sont rentrés dans le chalet. — À part.) Non ! c’est l’extérieur et l’attitude d’un homme sans ressources. Je m’y connais, moi !… Eh ! mais… voyons donc. (Il va à lui et lui parle sans que l’autre paraisse l’entendre.) Monsieur,… je vous demande pardon si je me permets de vous adresser la parole sans vous connaître… mais je suis en voyage, comme vous ; j’attends un assez bon déjeuner, et, comme je n’aime pas à manger seul, s’il vous plaisait d’accepter… (Reconnaissant le duc qui relève la tête.) Ah !…

LE DUC, sortant de sa rêverie.

Un bon déjeuner ? Hein !… Ah ! mon Dieu !… c’est toi, mon pauvre enfant ? (Il se lève.) Mais quand je dis pauvre… Non ! tu parais…

FLAMINIO.

Et vous, vous paraissez triste ! Est-ce que… ?

LE DUC.

Non ! toi d’abord ! D’où diable sors-tu ? Qu’es-tu devenu depuis… ?