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FLAMINIO.

Ah ! Sarah ! ne ferais-je pas mieux… ?

SARAH, avec énergie.

Tais-toi ! je sais ce que tu vas dire, tais-toi ! Ah ! ne le dis pas ! si tu m’aimes, ne le dis jamais.

FLAMINIO, s’assied à droite du canapé.

Eh bien, non ! jamais ! torture-moi, tuez-moi, vous savez bien que je resterai.

SARAH, à Barbara.

Oh ! il vaut mille fois mieux que moi ! après mes injures ! mes duretés !… (À Flaminio.) Tiens, vois-tu, personne, personne au monde n’a ta bonté, ta douceur généreuse, ton égalité d’âme. Et veux-tu que je te dise pourquoi tu as ce caractère-là ? C’est parce que tu aimes comme aucun homme ne sait aimer. Oui, nous nous le disons souvent, ma sœur et moi, tu aimes à toute heure, sans défaillance de cœur, sans lassitude de dévouement, sans préoccupation d’aucune de ces choses vaines et froides qui remplissent la vie prétendue sérieuse et utile des autres hommes. Tu renonces à tout pour moi, sans combat, sans regret, on dirait même avec joie ! tu acceptes l’idée de vivre obscur et pauvre, parce que tu sais que mon orgueil et mon bonheur sont là. Eh bien, oui, mon rêve, le rêve de toute ma vie, c’est d’être aimée ainsi, sans éclat, sans partage, sans distraction, puisque je ne peux pas aimer autrement, moi !

FLAMINIO.

Oh ! j’ai pu la faire souffrir, et c’est ainsi qu’elle m’en punit ! Chère miss Melvil, remerciez-la donc pour moi, car le bonheur m’étouffe.

BARBARA, qui a mis ses lunettes et gui s’est assise à gauche de la table avec un livre.

Oh ! parlez à elle, je lisé divus Plato ! je attendé la conclusion de Sarah, et je donner mon vote.

SARAH.

Eh bien, donnez-le, car j’ai résolu, en venant ici, de n’en sortir qu’avec sa parole.