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JEAN.

Bernard de Mauprat ? Certes ! le gros garçon ne sera pas ; de trop pour le moment, (À Gaucher.) Va ! (Gaucher sort. — À Antoine.) Qui avons-nous ici, ce soir ?

ANTOINE.

Excepté notre frère Laurent et le braconnier Courtaud, qui ne sont pas rentrés, maîtres et valets, nous y sommes tous ; plus, le déserteur Vincent ; Simonard, celui qui a tué son frère au cabaret ; le maquignon Francy, qui a volé les chevaux de la gabelle, et les deux Maucoin, ces porte-balles qu’on accuse d’avoir pris l’argenterie de madame de Rochemaure ; tous gens traqués comme des renards, et qui ne peuvent se passer de nous.

JEAN.

Allons ! ça nous fait vingt et un hommes déterminés, et qui jouent le tout pour le tout. C’est plus qu’il n’en faut pour tenir toute la force armée du pays, qui n’est pas grosse, sous le feu de nos bonnes petites meurtrières.

LÉONARD.

Et Bernard ? pourquoi ne pas le compter ?

JEAN.

Le beau neveu ? Ne le comptons pas encore, s’il vous plaît.

ANTOINE.

Pourquoi non ? Il est fort comme un taureau !

LÉONARD.

Brave comme le sanglier qui fait tête !

JEAN.

Oui, mais pas plus méchant qu’un mouton. Mes beaux amis, Bernard Mauprat est et ne sera jamais qu’une brute.

ANTOINE.

Comme feu monsieur son père, qui redoutait les tribunaux et qui nous a reniés, nous, ses frères ! Après ça, il n’est peut-être pas si sot que nous croyons !…

LÉONARD.

Frère Jean, vous haïssez Bernard ! Tenez, vous le haïssez trop ! Si la nature ne l’eût pas doué de la force de trois