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LE CHEVALIER.

Bernard ! nous sommes enfin seuls avec nos amis ; écoutez-moi donc. Depuis ce fatal événement, nous avons tous beaucoup souffert. Eh bien, je reconnais que vous avez montré une grande fermeté, et que vous ne vous êtes abaissé à aucune plainte contre le sort, à aucun reproche contre les hommes ; votre attitude a grandi votre caractère à mes yeux ; si vous êtes criminel, vous n’êtes pas un criminel vulgaire, et je retrouve en vous la vigueur de notre race… Mais je ne puis accepter, moi, que votre sang retombe sur le cœur de ma fille qui vous plaint, et sur le mien qui vous a aimé. Il faut donc m’obéir, Bernard, il faut partir ! Dieu est partout, et partout sa bonté accueille le repentir, surtout celui de la jeunesse ! Voyons, répondez, et promettez… Ne m’entendez-vous pas ?

PATIENCE, à Bernard, qui reste absorbé.

Bernard, le faites-vous exprès, de vous taire ? Oh ! je vois bien où le chagrin vous tient. Vous ne pouvez pas pardonner le doute qu’on fait de vous ! C’est un reste d’orgueil, ça ! Eh bien, vous avez eu des torts dans le temps, et vous en portez la peine ! Acceptez-la comme une punition, mais ne la faites pas plus dure que vous ne la méritez. Allons, défends toi ! tu n’as jamais senti le joug sur ton front, et la courroie te blesse ! mais laisse couler l’injure ! c’est de l’eau troublée par l’orage qui s’éclaircira au soleil de la vérité !

BERNARD.

Merci, ami !… Mais elle ! Allons, mon cœur, du courage… Edmée, m’ordonnez-vous de fuir ? Oui, puisque vous êtes accourue ici… C’est vous, vous surtout, qui ne croyez coupable !

EDMÉE.

Bernard, vous pouvez partir tranquille, nos vœux vous accompagneront.

LE CHEVALIER.

Et nous prierons pour vous.