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SUZANNE, qui a posé son balai sous le berceau.

Pourquoi donc ? est-ce que vous lui en voulez aussi, à mon amoureux ?

MAÎTRE VALENTIN ; il s’assied sur une souche.

Ah ! c’est encore votre amoureux ? Je ne croyais pas ! Après ça, il se passe toujours chez vous des choses si fantasques !

SUZANNE, riant.

Fantasques ! voyez-vous ça ! Apprenez, père Valentin, qu’il n’y a de fantasque chez nous… que moi. (s’appuyant sur son épaule avec bonhomie.) Oui, c’est moi qui suis folle ! Moquez-vous et grondez-moi ; vous en avez le droit, vous, le vieux voisin ! Tenez, j’ai eu un moment tantôt… C’est mal ! mais, que voulez-vous ! j’étais jalouse.

MAÎTRE VALENTIN, radouci.

Jalouse de… ? (Haussant les épaules.) Ah ! Suzanne ! vous êtes bien sotte, mon enfant, de n’avoir jamais vu qu’il y avait là, sous votre main, un bon garçon, un garçon de mérite… mon garçon, à moi, qui valait quinze Noël Plantier ; mais vous l’avez méprisé parce qu’il est pauvre, et vous donnez votre cœur et vos écus à un grand benêt…

SUZANNE.

Laissez ce benêt tranquille, voisin ! Je n’en suis pas encore si revenue que vous croyez ; et, tant qu’à votre fils, je lui rends justice ; mais jamais son idée n’a été pour moi, et je sais bien pour qui elle est. Il a beau s’en cacher. Les femmes voient clair !…

MAÎTRE VALENTIN, du ton d’un homme qui ne veut pas se compromettre.

Vous croyez que Reine… ? Dame ! si votre père lui faisait un sort… Mais puisque la voilà entichée de votre galant ?

SUZANNE.

Eh ! non. Elle n’a pas dit ça, elle ! C’est moi ! je rêvais !

MAÎTRE VALENTIN.

Ah ! vous croyez ?