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FLORA.

Mais vous ne savez donc pas dans quelle retraite nous vivons ici ?

LE PRINCE.

Si fait. Mais il n’y a pas de porte fermée pour le protecteur et l’ami des artistes.

FLORA.

Camille prétend n’avoir pas besoin d’autre protection que celle du maestro.

LE PRINCE.

Ah ! oui-da ! Elle se trompe bien ! Il est donc jaloux comme un tigre, le vieux maître ?

FLORA.

Oui, jaloux de notre réputation à l’excès. Comment avez-vous fait pour entrer ici sans le rencontrer ?

LE PRINCE, s’asseyant fort à l’aise.

Je n’ai rencontré personne. Un domestique m’a ouvert une porte de jardin. J’ai dit que je n’avais pas besoin d’être annoncé ; j’ai suivi une allée, j’ai trouvé une autre porte, et me voici : c’est pas plus malin que ça. Ah çà ! ma chère enfant (Il regarde sa montre), il faut que je sois à Gênes demain soir ; j’y reste douze heures et je repars pour Naples. Si vous voulez que je vous y conduise, prenez vos gants et votre chapeau.

FLORA.

Mon Dieu ! comme cela ? sans réflexion ? sans consulter mes sœurs ?

LE PRINCE.

Ça ne me regarde pas, et vos réflexions doivent être faites. Vous m’avez dit hier au soir au théâtre : « Je veux quitter Milan ! » Je vous ai dit. « Vous ferez bien. Le succès de votre sœur empêchera toujours le vôtre. C’était une bêtise de vous faire débuter avec elle. Je vous ai avertie, vous n’avez pas voulu me croire ; à présent, vous en mordez vos jolis doigts ! Vous m’avez demandé si je pourrais vous faire avoir un engagement à San-Carlo. Je vous ai dit qu’il y en avait un vacant et qu’on me le proposait pour une petite personne