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ISABELLE.

Oh ! ne me parlez point de moi ! Les chagrins que j’ai me font négliger tout cela, et je suis aujourd’hui surtout du dernier délabrement ; mais j’ai le goût assez formé, et, si vous voulez me charger de vos acquêts…

VIOLETTE.

Merci, mamselle… C’est de l’argent perdu que de se parer comme une châsse, pour n’en pas valoir deux liards de plus, allez !

ISABELLE, à part.

Elle est avare, une vraie paysanne ! Par quel bout la prendrai-je donc ?

VIOLETTE, regardant vers le fond du théâtre, à part.

Je ne vois plus Pédrolino, pas moins ! (Haut.) Voyons, mamselle, vous êtes là à me retenir, à me faire des offres… faut que vous ayez besoin de quelque chose ; si vous m’aimez tant comme vous dites, vous devez croire que j’ai bon cœur, et, partant, desserrer le vôtre.

ISABELLE, à part.

Ma foi, oui !… allons au fait. (Haut.) Mignonne, c’est un billet de quelque dix mille écus que m’avait souscrit votre cousin Octave, pour une parure d’émeraudes qu’il me fit acheter, bien malgré moi, hélas ! mais il me poussait à des folies !… il m’aimait tant, ce pauvre cher !

Elle porte son mouchoir à ses yeux.
VIOLETTE.

Ah ! c’était votre galant ?

ISABELLE.

Il était si près de m’épouser, que vous pouvez me considérer comme sa veuve.

VIOLETTE, touchant le manteau rose d’Isabelle.

C’est donc ça la couleur du deuil dans le pays d’ici ?

ISABELLE, à part.

Elle s’avise de tout, cette peste de fille ! (Haut.) C’est par décence, et pour attester la pureté de mes relations avec le défunt que je me vêts ainsi ; mais le billet…