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en tire des fruits qu’il passe en cachette à Armande.) Il faut être sobre et croire tout ce que votre sœur vous dit.

ARMANDE.

Allons, j’y essayerai : merci de la leçon, mon bon ami. Je vais faire un tour en attendant le déjeuner pour m’exercer à la patience.

Elle sort en grignotant.




Scène VI


MOLIÈRE, MADELEINE.


MADELEINE.

Molière, Molière ! vous l’aimez trop, cette petite fille !

MOLIÈRE.

Je l’aime comme mon enfant.

MADELEINE.

Comme votre enfant ! Vous n’avez guère plus de trente ans ; elle en a bientôt quinze. Êtes-vous d’âge à faire le tuteur ?

MOLIÈRE.

Il me semble que oui. Je m’imagine qu’elle est votre nièce et que je suis son père, parce que je vous considère comme ma sœur. La solide amitié qui m’unit à vous, Madeleine, remplit ma vie de vaillance et de force ; la sainte tendresse que j’ai pour Armande égayé mes loisirs et m’adoucit le cœur. C’est de vous que je reçois tout ce que j’ai de bon dans l’âme, et c’est à elle que je le voudrais pouvoir donner comme un bien qui lui est dû plus qu’à moi.

MADELEINE.

Vous ne nous aimez pas de la même manière, je le sais ; mais n’a-t-elle point la meilleure part ? Il y a huit ans que nous partageons, vous et moi, mêmes soins et même fortune : il y a six mois à peine que ma sœur est avec nous, et déjà elle vous occupe plus que de raison.