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qui s’en mêle, mais sans dessein arrêté. Les passants les regardent, écoutent, crient quelquefois et fuient devant les soldats pour se reformer à deux pas de là ou revenir aux coins de rue dès que la troupe a passé.

J’ai envoyé Mayer à Montmartre chercher une malle prêtée à Palognon[1]. Il dit qu’il passera partout. Il me fait trop de protestations. Je ne sais si ce n’est pas un mouchard qu’on a mis à mes trousses, peu m’importe. Il a la figure d’un honnête homme et je lui ai donné une poignée de main pour le remercier de ses offres de service. Mais aussitôt après, il m’a demandé si L. R[2]. était à Paris. Si je l’avais su, je ne le lui aurais pas dit. On est méfiant malgré soi, dans ces temps de trouble et de crime.

Un piquet de voltigeurs vient s’installer l’arme au pied sous ma fenêtre. C’est l’armurier de la maison qui craint qu’on ne pille sa boutique. Deux officiers les commandent, l’épée nue à la main. Ils sont décorés, ils ont l’air résolu à tuer. Les troupiers sont insouciants, on ouvre les fenêtres et on les regarde.

  1. Sobriquet de Villevieille, un peintre ami de Maurice Sand.
  2. Ledru-Rollin.