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à la révélation formulée, et celui qui n’en tient pas compte, risque beaucoup d’agir contrairement à l’inspiration divine qui est déjà latente dans les masses, lorsqu’elle agite plus particulièrement les intelligences choisies.

Il ne me siérait pas, d’ailleurs, de discuter obstinément devant vous sur une pure question de principe. Le talent vous donnerait la victoire, et l’autorité de votre nom, en même temps que mon affection pour vous, me rendrait encore plus faible que je ne le suis naturellement, pour soutenir ma protestation. Mais où je puis avoir confiance en moi-même, c’est quand je parle d’un sentiment général, et quand je soutiens une protestation collective. Je vous supplie donc d’écouter cette protestation. Elle prend pour organe, en cet instant, un cœur qui n’a jamais douté du vôtre.

Une notable portion du peuple français repousse l’admission d’un seul homme au pouvoir exécutif, et il n’est pas un seul homme de bien, à l’heure qu’il est, en France, qui puisse vouloir prendre pour l’instrument de son succès une majorité oppressive. Cette majorité, admettons-le, n’est point disposée à tyranniser la minorité. L’homme de bien qu’elle aurait choisi aurait horreur d’une goutte de sang répandu pour le triomphe de sa personnalité. Oui, oui, j’admets tout cela ; eh bien, mon respectable ami, l’établissement d’une présidence unique est impossible aujourd’hui en France sans la guerre civile. Veuillez y réfléchir, veuillez regarder par vos yeux, écouter par